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Blog médical et geek de médecine générale :
« Guérir parfois, soulager souvent, écouter toujours. » (Louis Pasteur)

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lundi 21 avril 2025

Dragi Webdo n°481 : calendrier vaccinal US (reco CDC), protoxyde d'azote (ANSM), gepotidacine, nt-proBNP, TVP/cancer, technologies/démence, communication, tâches illégitimes au travail

Bonjour ! Découvrons la "Bern Illegitimat Tasks Scale" qui évalue les tâches illégitimes liées à ce qu'on fait eu travail. Cette étude d'Annals of family medicine trouve que le système de remboursement (ou de payement) à la performance (#ROSP) était associé à la perception de taches "illégitimes" et augmentait la détresse morale, ce qui impactait indirectement sur la qualité des soins. Ainsi, dans ce cadre, les auteurs prônent notamment une simplification des tâches administratives. Sur ce, bonne lecture !

 

1/ Pharmacovigilance

On  en avait déjà parlé ici, l'ANSM revient sur les intoxications au protoxyde d'azote (N2O). Il y a eu une augmentation de 30% des signalements aux centres de pharmacodépendance-addictovigilance pour la consommation de N2O en 1 an, liés à plus de 90% des cas à des prise de doses élevées et dans 50% des cas la consommation était régulière. C'est malheureusement assez concordant avec cette étude chez les étudiants en médecine, qui retrouvait que 70% avaient déjà testé le N2O de façon récréative, que 20% consommaient mensuellement et que 8% avaient déjà eu une complication notamment en cas de prises supérieures à 10 ballons.

On entend souvent dire qu'il y a beaucoup trop de cours de "relation et communication" en médecine générale. Cette revue systématique d'Annals of internal medicine a trouvé que, dans incidents mettant en danger les patients, les problèmes de communication étaient impliqués dans 24% des cas et exclusivement responsables dans 13%  des cas.

 

2/ Cardiovasculaire

Le seuil du nt-proBNP dans le diagnostic de l'insuffisance cardiaque est toujours autant étudié: 125? 400? autre chose? (cf ici et ). Cette nouvelle étude de Circulation concerne l'insuffisance cardiaque à FE préservé et fait introduire la notion d'IMC pour choisir les seuils. Ainsi, le seuil de 125 a une sensibilité de 82% si IMC < 35 mais est moins performant (67%) au delà. Le seuil >500 a une spécificité de 85% si IMC < 35 et de 100% si IMC > 35. Mais si IMC > 35, un seuil de 220 a déjà une sensibilité de 90% environ. Enfin, quel que soit l'IMC, un nt-proBNP < 50 excluait l'insuffisance cardiaque avec une sensibilité de 97%. Au total, on peut retenir de cette étude, les seuils:  nt-proBNP < 50 = exclusion de l'IC, et pour le diagnostic: > 125 si IMC < 35 et > 420 si IMC > 35.

 

3/ Oncologie

Cet essai randomisé français a comparé l'apixaban 5mg x 2 par jour versus 2,5mg x 2 par jour chez des patients atteints de cancer dans le traitement préventif des MTEV suivant un épisode de phlébite traitée par 6 mois à pleine dose. Les auteurs ont confirmé la non-infériorité du dosage réduit par rapport au dosage classique sur le risque de survenue de récidive (2,8% versus 2,1%). De plus, il y avait un risque d'hémorragie plus faible avec le faible dosage (12,1% vs 15,6%).


4/ Infectiologie

En attendant le nouveau calendrier vaccinal français qui ne devrait pas tarder, voici le calendrier américain 2025. Chez l'enfant, on retrouve les classiques DTPCa, hépatite B, pneumocoque, haemophilus, varicelle (politique vaccinale américaine depuis longtemps), rotavirus, puis anti-HPV entre 9 et 14 ans. Mais on trouve aussi nirsevimab si la mère n'a pas été vaccinée, les vaccins Covid et grippe annuels dès 1 an, et hépatite A. Le vaccin anti-méningo ACWY n'est recommandé qu'à 11 et 16 ans (soit 2 doses), et le vaccin méningo B n'est recommandé que selon un modèle de décision partagée entre 16 et 23 ans. Chez l'adulte, les DTPCa sont tous les 10 ans (et à chaque grossesse pour les femmes), les vaccins grippe et covid sont toujours recommandés annuellement. Et il y a aussi le vaccin VRS à partir de 75 ans (ou 60 ans si facteurs de risque), le vaccin zona recombinant à 50 ans, et le vaccin pneumocoque à 50 ans (soit P15 suivi du P23 ou P20, soit 1 dose P20 ou P21)

La gepotidacine est un nouvel antibiotique, la 1er triazaacénaphtylène bactéricide (ça fait des points au Scrabble, mais en gros, elle inhibe la réplication de l'ADN bactérien). Bref, voici un essai randomisé du Lancet comparant la gepotidacine orale (3g pris à H0 et H12) à 500 mg de ceftriaxone IM + 1g d'azithromycine oral dans le traitement de l'infection urogénitale à gonocoque évaluée à 1 semaine du traitement par culture. Il y a eu 600 patients analysés ( 70% d'hommes HSM, 20% d'hommes HSF, 10% de femmes). La gepotidacine a été efficace chez 93% des patients et le traitement classique à 92%. Cependant, il y avait 74% d'effets indésirables dans le traitement testé versus 16% dans le traitement classiques (NNH=2). Les effets indésirables étaient modérés et quasiment tous gastro-intestinaux.

 

5/ Neurologie

Voici une méta-analyse de Nature a étudié l'association entre l'utilisation de technologies (smartphone, internet, ordinateur) et le risque de déclin cognitif. A partir des études observationnelles incluant 400 000 patients âgés de 69 ans en moyenne, les auteurs trouve que l'utilisation de technologies réduisait le risque de troubles cognitifs et le déclin cognitif au cours du temps. Mais encore une fois, est-ce que c'est parce que les capacités cognitives sont bonnes qu'on utilise des technologies ou parce qu'on utilise des technologies qu'elles le sont...


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dimanche 13 avril 2025

Dragi Webdo n°480 : allaitement (USPSTF), pneumopathies (NICE), OMA, vaccin zona/démences, guide en radiologie, gonocoque/chlamydia, traitements BPCO

Bonjour ! Pour commencer voici un essai randomisé  comparant un groupe contrôle à un groupe de médecin qui bénéficiaient d'un guide au choix de prescription d'examen d'imagerie mis en place par la société européenne de radiologie (ESR iGuide). Point intéressant, il n'y avait que 6-7% d'examens d'imagerie inappropriés. Cependant, l'utilisation du guide n'a pas amélioré ce taux d'examen inappropriés. Voici les autres actualités, bonne lecture !

 

1/ Infectiologie

Cette étude d'Annals of internal medicine a inclus d'après un registre américain, plus de 6000 patients avec chlamydia et 2000 avec gonocoque. Les auteurs ont trouvé qu'il y avait 25% des patients avec chlamydia et 30% avec gonocoque qui n'avait pas eu de prescriptions d'antibiotiques dans les 30 jours suivants le diagnostic... De plus, le traitement recommandé de doxycycline pour chlamydia n'était prescrit que dans 14% des antibiothérapies et la ceftriaxone pour le gonocoque dans 39% des cas. Il y a donc encore pas mal de progrès à faire....

Le NEJM publie une revue narrative sur les otites moyennes aiguës chez l'enfant. Selon les auteurs, environ 1/3 des viroses des voies respiratoires supérieures se compliquent d'une OMA dans un délai moyen de 4 jours. Les prélèvements retrouvent une bactérie dans 80% des cas,  incluant des pneumocoques (40% de sensibilité diminuée aux pénicillines), les Haemophilus (50% producteurs de beta-lactamases) et M Catarrhalis (100% de beta-lactamases). L'otoscopie fait le diagnostic, et repose essentiellement sur 1 seul signe: le bombement tympanique. Les autres formes d'otites sont la myringite bulleuse, l'otite pavimenteuse (avec plein de petites bulles dessus et qui serait un signe de régression de l'OMA mais c'est pas clair) et l'otite séreuse. Sur le plan thérapeutique, vu l'évolution naturelle et la rareté des complications (4 mastoïdites pour 10 000, NNH de ne pas traiter: 5000), une surveillance initiale est adaptée dans les formes non sévères (sans que des critères de sévérité unanimes n'aient été définis). Concernant les antibiotiques, le NNT pour être asymptomatique à 3 jours, ou 7 jours est d'environ 20 patients. Les antibios réduisent le risque de bilatéralisation (NNT=11) et le risque de perforation (NNT=33). Le NNH pour les diarrhées sous antibiotiques est de 5-8 patients. L'amoxicilline est le traitement de 1ère ligne, mais l'amoxicilline+acide clavulanique peut être préféré si suspicion d'Haemophilus (conjonctivite, antibiotiques dans les 30 jours, otorrhée). Enfin, avant 24 mois, un traitement de 5 jours semble insuffisamment efficace par rapport à un traitement de 10 jours (34% d'échec versus 16%). Les otites récurrentes sont définies comme 3 épisodes en 3 mois ou 4 en 12 mois. Dans 5 essais de qualité moyenne, les ATT pour OMA récurrentes réduisaient le nombre d'épisode d'OMA dans les 6 mois de 1 (ce qui semble pas terrible), mais correspondant quand même à un NNT à 6 mois de 3 patients à traiter pour ne pas avoir de récidive d'OMA.. Dans un bon essai récent, il n'y avait pas de différence significative chez des enfants majoritairement âgés de 6 à 24 mois sur le nombre de récidive d'OMA à 2 ans de suivi (c'est peut être un peu long 2 ans d'un point de vue parental, car si on regarde les courbes de l'étude, il y a une différence probablement significative à jusqu'à 12 mois après intervention) .

 

2/ Gynécologie

L'USPSTF a publié une recommandation en faveur de la réalisation d'intervention en soins primaires ou d'adressages pour mettre en place des interventions sur l'allaitement pendant la grossesse et le post-partum. En effet, ces interventions améliorent l'initiation et la durée de l'allaitement maternel (dont les bénéfices rappelés sont notamment des réductions de l'asthme, des infections respiratoires et digestives et de la mortalité chez l'enfant, et des réductions du cancer de l'ovaire, du diabète et de l'HTA chez la mère). Initier et poursuivre l'allaitement c'est bien (si souhaité!), mais la durée des congés parentaux en France n'appuie pas tellement le maintien dans de bonnes conditions dans la durée.. 


3/ Pneumologie

Le débat de la double bronchodilatation (LAMA+LABA) versus trithérapie (LAMA+LABA+CSI) dans la BPCO fait toujours rage chez les pneumologues. Cet article de l'ERJ est une modélisation qui retrouve qu'il y aurait un bénéfice à traiter par trithérapie les patients BPCO quand ils atteignent 50 ans. Par rapport à l'absence de traitement, la double bronchodilatation réduirait la mortalité de 5% et que l'ajout des CSI réduirait la mortalité de 12% supplémentaires! Cependant, ces modélisations ont inclus les 2 études ETHOS et IMPACT pour évaluer le bénéfice de la trithérapie, études montrant en effet un bénéfice de mortalité, mais seulement chez des patients exacerbateurs fréquents malgré une double bronchodilatation. Il ne semble donc pas très judicieux d'extrapoler ces résultats à des patients "plus jeunes" et leur analyse ne prend pas en compte les effets indésirables des CSI (cf  ici et ).

Selon son "draft" de recommandations sur les pneumopathies infectieuses, NICE britannique prévoit un traitement de 5 jours chez l'adulte mais de 3 jours chez l'enfant si cliniquement stable (sinon 5 jours). Les bithérapies amox + macrolides sont proposées si sévérité modérée et suspicion de bactérie atypique (l'amoxicilline + acide clavulanique n'est pas mentionné dans les pneumopathies ambulatoires non sévères). Enfin, un dosage initial de CRP, recommandé pour les patients hospitalisés.


4/ Neurologie

Un article de la grande revue Nature a étudié l'impact de la vaccination anti-zona (par Zostavax®) sur la survenue de démence. Ils ont comparé 2 cohortes de patients dans le pays de Galles ceux nés avant le 1er septembre 1933 et ceux nés à partir du 2 septembre 1933. En effet, il a été recommandé qu'au 2 septembre 2013, les patients de 80 ans étaient éligibles au vaccin. En comparant des populations "immédiatement consécutives", il est peu probable qu'elles soient différentes. Les auteurs n'ont donc pas comparé des vaccinés et des non vaccinés, mais la population "non vaccinable" et la population "vaccinable". Après 8 ans de suivi, la population "vaccinable" était vaccinée à 47% environ, a eu moins de Zona et a eu un risque de démence diminué par rapport à la population "non vaccinable". Comme c'est toute une population qui est étudiée, indépendamment de la vaccination individuelle, cela évite le biais selon lequel "ce sont ceux qui avaient le moins de troubles mnésiques qui ont été vaccinés". Bref, c'est intéressant, cependant, si le mécanisme des démences était aussi fortement lié au VZV, il est étrange que la diminution du risque de démence ne soit retrouvée que chez les femmes et pas chez les hommes. Un essai randomisé serait intéressant pour conclure!

 



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mercredi 9 avril 2025

Dragi Webdo n°479 : insuffisance veineuse (recos US), semaglutide oral, aGLP-1/efficacité, ostéopénie, patient précaire, richesse/mortalité

Bonjour, j'espère que vous avez bien croisé les doigt la semaine dernière mais vous pouvez maintenant reprendre une activité normale ! Encore une fois, merci tout le monde pour votre fidélité, vos  messages  et vos encouragements ! Ça a été un plaisir d'en croiser certain et certaines au #CMGF2025 ! Voici les actualités de la semaine, bonne lecture !

 

1/ Exercice médical

Dans une étude américaine, les patients déclarent à 71% qu'il est très important d'avoir "son" MG. Les patients voulaient consulter "leur" MG pour des bilans annuels (53%), le suivi des maladies chroniques (55%) et le suivi de maladies psychiatriques (57%). Pour ces 3 motifs, les patients étaient prêts à attendre 3-4 semaines pour voir "leur" MG. Cependant, pour un symptôme aigu, voir "son" MG n'était important que pour 7% des patients.

Cet article du NEJM a comparé la mortalité à 10 ans dans des populations américaines et européennes selon la richesse des personnes divisées en quartiles de richesse par région. Assez logiquement, parmi les 73 000 patients inclus, la mortalité globale des patients dans le quartile le plus pauvre était supérieure à celle des 3 autres quartiles. De plus, la mortalité du quartile le plus riche américain était similaire à la mortalité du quartile le plus pauvre des pays d'Europe de l'ouest et du nord (Autriche, Belgique, Danemark, France, Allemagne, Pays-Bas, Suède et Suisse).

Le BMJ aborde la prise en charge du patient sans domicile fixe. Tout d'abord, il faut rappeler comme on vient de l'écrire ci dessus, que les patients SDF ont un risque de mortalité augmenté. De plus, ils subissent une discrimination de la part des professionnels de santé, réduisant leur volonté d'accéder aux soins. Parmi les points spécifiques:

  • Concernant la stigmatisation:  il est nécessaire d'interroger sur traumatismes anciens ou actuels et de demander si les patients se sentent "en sécurité". Il faut bien entendu rester empathique, valoriser les patients qui nous parlent de leur expérience, et essayer de les impliquer dans les soins pour obtenir une meilleure adhésion
  • Concernant les barrières administratives: les auteurs recommandent d'accepter les patients consultants, en étant flexible sur les horaires de RDV, les patients ayant souvent des difficultés sur ce point, et ne pas interrompre les prises en charge en cas de RDV non honorés. De plus, le médecin est une ressource pour orienter dans les difficultés administratives
  • Concernant les prescriptions: il faut arriver a surmonter de nombreuses barrières à la prise de médicaments telles que leur stockage (armoire? réfrigérateur?), le timing des prises, les modalités de prise (par exemple à prendre en mangeant s'il n'y a pas de repas)...
  • Concernant les soins: une vigilance est nécessaire devant les risques d'IST, d'HTA, de diabète, de dépendance au tabac et à l'alcool, d'usage de drogues, de troubles psychiatriques et de suicide. Enfin,  la non-vaccination est également fréquente.

 

2/ Cardiovasculaire

Deux ans après leur publication, le JAMA décrit les recommandations américaines de 2023 concernant l'insuffisance veineuse chronique des membres inférieurs. Pour les télangectasies et les veines réticulaires de  1-3mm de diamètre qui sont asymptomatiques, le Doppler n'est pas recommandé systématiquement et une prise en charge par bas de contention, contrôle du poids et limiter la station debout est recommandée (avis d'expert). En cas de symptômes, un Doppler est recommandé. La sclérothérapie est recommandée pour les téléngectasies et veines réticulaires. Pour les veines variqueuses (>3 mm de diamètre) et reflux veineux des saphènes, une prise en charge chirurgicale est recommandée sans passer par un test thérapeutique de 3 mois avec une compression. Dans ce cas, une ablation endoveineuse semble à préférer devant la ligature ou le stripping. Ce sont des recommandations "fortes" mais avec un niveau de preuve modéré...

 

3/ Rhumatologie

Le Lancet s'intéresse au traitement préventif des fractures chez les patientes avec ostéopénie (on en avait parlé ici). Globalement c'est une revue narrative, montrant l'importance du nombre de fractures survenant chez des patientes en ostéopénie. Les auteurs estiment que le risque de fracture de hanche au cours de la vie d'une femme est de 50% si elle a de l'ostéopénie à 50 ans. D'un point de vue médico-économique, alors que les recommandations classiques proposent un traitement lorsque le FRAX est > 3% pour les fractures de hanche ou > 20% pour le risque de fractures majeures, il est possible qu'il soit coût-efficace de traiter quand le risque de fracture majeurs est > 10-15% (NNT = 22 à 5 ans pour un seuil à 15% à 65 ans et NNT=35 pour un seuil à 10%). Concernant la sécurité, les fractures atypiques surviennent 2.5 patientes pour 10 000 par an après  3-5 ans de traitement et 6-13 patientes pour 10 000 par an au delà, ce qui justifie la fenêtre thérapeutique de 2 ans après 3-5 ans. Les ostéonécroses de la mâchoire surviennent chez 5 patientes pour 10 000 par an. En pratique, la stratégie canadienne semble encore une fois la plus adaptée avec un seuil à 15% déclenchant une ostéodensitométrie et une réévaluation du risque avec les résultats.

 


4/ Diabétologie

On va revenir sur le semaglutide oral, qui dans l'étude PIONNER-6 n'avait pas montré d'efficacité sur son critère principal mais réduisait la mortalité globale et cardiovasculaire de façon exploratoire (cf ici). On espérait donc beaucoup de l'étude SOUL qui comparait le semaglutide oral vs placebo chez des patients ayant environ 66 ans, une HbA1c à 8%, une maladie rénale pour  40% d'entre eux et une maladie cardiovasculaire pour  80%. Après 4 ans de suivi, le critère composite cardiovasculaire est survenu moins fréquemment dans le groupe traité (OR= 0,86, NNT = 167 patients par an). De façon exploratoire, ce résultat semblait porté par les infarctus non fatals, sans différence sur les mortalités cardiovasculaires ou globales. C'est donc un peu une déception pour cet analogue oral qui a finalement des résultats cardiovasculaires semblables à sa version injectable, mais sans réduction de mortalité en cas de maladie rénale chronique (cf ici).

Malgré cela, si on réalise une revue systématique avec méta-analyse, on voit que les analogues du GLP-1 réduisent significativement la mortalité globale (NNT = 100), la mortalité cardiovasculaire (NNT=143), les évènements cardiovasculaires (NNT=72), les infarctus (NNT=67), les AVC (NNT=250), les insuffisances cardiaques (NNT= 200) et les insuffisances rénales terminales (NNT=500). Enfin, il ne semblait pas y avoir d’interaction entre l'administration oral et injectable, ce qui signifie que les effets sont supposés homogènes entre ces 2 modes d’administration. Sur l'efficacité, rien de surprenant, mais dans cette immense méta-analyse incluant 71 000 patients, il est intéressant de regarder les effets indésirables. Il n'y avait pas de sur-risque de pancréatite, de tout cancer, de cancer du pancréas ni de cancer thyroïdien.


 

 

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mardi 1 avril 2025

Dragi Webdo n°478 : Tuberculose (HAS), Kawasaki, corticoïdes inhalés, risque digital, polykystose rénale

Bonjour ! Pour ceux qui n'étaient pas au congrès, vous pouvez retrouver les commentaires concernant un certain nombre de sessions sur Twitter et Bluesky. Et sinon, bonne lecture !

 

1/ Pharmacovigilance

Dans une cohorte incluant  170 000 patients diabétiques, les patients prenant du semaglutide avaient un risque de neuropathie optique ischémique antérieure non artéritique (NOIA-NA) augmenté à partir de 2 ans de traitement par rapport à ceux prenant des traitements non analogues du GLP-1 mais cet évènement reste très rare (0.24 pour 1000 vs 0.15 pour 1000)

Une nouvelle étude s'intéresse aux effets indésirables des corticoïdes inhalés (CSI) dans la BPCO. Le critère de jugement principal (CJP) était constitué de survenue diabète de type 2, cataracte, pneumonie, ostéoporose ou fracture non traumatique. A 4 ans de suivi, pour les patients en prenant au long cours versus ceux en ayant eu uniquement de façon ponctuelle, le NNH pour au moins un élément du CJP était de 5 patients. Pour chacun des éléments du critère, le risque  de survenue était multiplié par environ 2,5.


 

2/ Cardiologie

Une méta-analyse publiée dans le Journal of Chirovascular Reviews suggère que croiser les doigts quotidiennement améliorerait significativement la chance de ne pas avoir un infarctus ou un AVC avec un NNT = 120 patients par an pour éviter un évènement cardiovasculaire, soit a peine moins bien que l'efficacité des statines. Les auteurs préconisent l'utilisation du score EDF (Elasticity and Dexterity Finger score) pour stratifier le risque, et des essais sont en cours pour évaluer si l'index et le majeur sont les doigts à croiser préférentiellement (à noter que les patients avec un Marfan ou un Ehlers Danlos étaient exclus de ces études). Reste à voir si les recommandations ESC s’aligneront sur ces données (en tous cas, ça sera du même niveau de preuve que certaines de leurs précédentes recos...). Croisons les doigts!

 

3/ Infectiologie

La HAS a publié une recommandation sur le dépistage de tuberculose pulmonaire. Le dépistage doit être centré sur les populations à risque de façon systématique pour les patients en milieu carcéral, les patients migrants en France depuis moins de 2 ans, les patients ayant vécu en pays de forte endémie pendant plus de 6 mois, et de façon opportuniste pour les patients précaires ou SDF ou en marge de la société +/- usagers de drogues IV. Ce dépistage s'intègre dans un prise en charge globale (avec éventuellement dépistages VIH, VHB, VHC). Chez l'adolescent et l'adulte, la RXT est l'examen de dépistage recommandé (un test de biologie moléculaire rapide peut aussi être utilisé notamment en milieu carcéral). Chez l'enfant, une IDR ou une IGRA (quantiféron) sont proposé en 1er lieu chez les patients avec indication. En cas de positivité, une RXT est indiquée pour déterminer s'il faut hospitaliser (RXT positive) ou faire un traitement prophylactique (IDR/IGRA positive avec RXT négative). Concernant la vaccination par BCG, il est recommandé de vacciner les enfants nés en Guyane ou Mayotte, ou avant 5 ans si facteur de risque dans les autres département (incluant Ile de France).

 

4/ Néphrologie

Le JAMA aborde la polykystose rénale autosomique dominante (PKAD) . Elle se caractérise par des kyste rénaux (>10) et des reins de plus de 13cm (alors que les polykystoses acquises montrent des reins atrophiés <10cm). Des kystes hépatiques sont également présents chez  90% des patients et 10% ont des anévrismes cérébraux. Pour le diagnostic, l'échographie (notamment chez l'enfant) ou l'IRM sont proposés (sachant que l'IRM détecte mieux les petits kystes). En cas de forme typique, il n'est pas nécessaire de  faire le test génétique. Le principal risque est néphrologique avec  50% de dialyse à  60 ans et le risque est évaluer par le PROPKD Score. Le traitement repose essentiellement sur des RHD (hyperhydratation avec 2,5L/j , objectif IMC < 25, pas d'alcool ni tabac, activité physique, pas d'AINS...) , un contrôle tensionnel parfait ( <110/75 avant 50 ans et  < 120/80 après  50 ans) notamment avec IEC/ARAII. Le tolvaptan est un traitement spécifique réduisant la dégradation néphrologique. Concernant les anévrismes cérébraux, un dépistage est recommandé, mais une IRM normale ne prédit pas de la survenue ultérieure d'anévrismes (le rythme d'un éventuel dépistage n'est pas détaillé). Enfin, le dépistage chez les membres familiaux est recommandé à l'âge adulte (donc à 18 ans), plutôt par IRM qu'échographie selon les auteurs. Cependant, un suivi tensionnel est nécessaire chez les enfants et adolescents car 30% ont de l'HTA juvénile.

 


5/ Pédiatrie

Cet article revient sur le Kawasaki en s'appuyant notamment sur les recommandations de 2020. Ainsi, il est nécessaire 3 ou 4 autres critères minimum (avec généralement la fièvre) pour qu'il y ait un diagnostic de Kawasaki.

- Concernant la fièvre, il n'y a pas de durée dans les critères, car 30% surviennent à moins de 5 jours de fièvre. 

- L'exanthème polymorphe est remplacé par "rash cutané", l'éruption n'étant pas forcément polymorphe, et pouvant être scarlatiniforme, morbiliforme, urticarienne ou être une rougeur au site d'inoculation du BCG (signe présent chez 70% des moins de 20 mois avec Kawasaki)

- L'enanthème buccal se manifeste par une chéilite, une langue framboisée, une rougeur diffuse de la cavité oro-pharyngée.

- L'hyperhémie conjonctivale bulbaire bilatérale non purulente 

- L'atteinte des extrémités:  érythème et oedème palmo-plantaire au stade initial puis desquamation péri-unguéale au stade tardif.

- Une adénopathie cervicale non suppurative qui est plus rare que les autres signes.

La présence de 2 critères peut parfois suffire si le diagnostic est suspecté après avoir écarté les autres diagnostics, ou en présence d'anomalie biologiques (syndrome inflammatoire biologique, présences de lymphocytes immatures, hyponatrémie, anomalie du bilan hépatique, nt-proBNP anormal...) ou coronariennes évocatrices. La prise en charge est poursuivie aux urgences pour un traitement par immunoglobulines.


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A la semaine prochaine et bon 1er avril !

 

@Dr_Agibus et @DrePétronille


mercredi 26 mars 2025

Dragi Webdo n°477 : vaccin méningite (HAS), désogestrel/méningiomes (ANSM), migraines (recos US), dépistage rétinopathie diabétique, Ramadan/pneumologie, nirsevimab, LMC, négociations médecin/patient

Bonjour ! Commençons ce billet avec un article parlant de "négociation avec les patients à propos de tests, médicaments et adressages", correspondant à environ 15% des consultations. Les réponses "éducatives" sont moins efficaces que des réponses "d’exploration" (on va donc détailler des éléments d'entretien motivationnel) . Ainsi, les auteurs recommandent de questionner pour permettre au patient d'exprimer totalement ses préoccupations, de répondre au patient en nommant/validant ses sentiments et d'éviter les déclarations avant d'avoir entièrement compris la demande du patient.

 

1/ Pharmacovigilance

L'ANSM s'appuie sur les données d'Epiphare pour publier des recommandations concernant le risque de méningiome sous désogestrel (risque estimé à 1 méningiome opéré pour 67 000 utilisatrices). Ainsi, l'agence recommande de réaliser une IRM cérébrale aux patientes sous désogestrel en pilule (cerazette, optimizette ...) ou en implant (nextplanon) et sous désogestrel 150 associé à l'éthinylestradiol (varnoline, mercilon...) si : 1/ antécédent de prise d'un progestatif à haut risque (chlormadinone, cyprotérone, nomégestrol, médrogestone et médroxyprogestérone ) pendant plus d'un an ou si 2/apparition de symptômes de méningiome sous traitement (maux de tête persistants, troubles visuels, faiblesse musculaire, troubles de l’équilibre, troubles du langage, perte de mémoire, épilepsie nouvelle ou aggravée). Il n'y a pas d'IRM recommandée systématiquement. En cas de méningiome, le traitement doit être interrompu et sera contre-indiqué.

 

2/ Infectiologie

La HAS a publié des recommandations rattrapage vaccinal élargies dans le contexte d’augmentation du nombre de méningites (cf ci-dessous, mais c'est pas flagrant sur les données exposées dans l'argumentaire, mais on voit mieux sur le graphique cumulé du Pr Taha au CMGF [ajout 27/03/25]) . Concernant les méningocoques ACWY, un rattrapage vaccinal entre 1 et 3 ans en 1 dose est recommandé et le rattrapage des jeunes adultes jusqu'à 25 ans devrait être recommandé pendant 2 ans. Concernant le méningocoque B, un rattrapage en 2 doses jusqu'à 5 ans est recommandé mais il n'est pas recommandé de le faire systématiquement chez l'adolescent. Les auteurs demandent un remboursement possible à cet âge entre 15 et 24 ans (ce qui n'est pas le cas actuellement) pour permettre une vaccination eux adolescents le souhaitant (ce qui serait similaire aux recommandations américaines).

 

 

Un article français a été publié concernant l'efficacité du Nirsevimab en se basant sur les données du SNDS. Les auteurs ont appariés 40 000 nourrissons ayant reçu du Nirsevimab avec 40 000 nourrissons n'en ayant pas reçu entre septembre  2023 et janvier 2024. Les nourrissons non traités avaient plus souvent la CSS (23% vs 11%), consultaient plus en PMI et étaient davantage nés en hôpital public. Concernant le critère de jugement principal après ajustements, 0.8% des enfants traités ont été hospitalisés pour une infection respiratoire basse à VRS versus  2.4% chez les non traités (NNT=63), soit une efficacité de  65% sur ce critère. Enfin, notons que sur ces 80 000 enfants, incluant  379 traités hospitalisés dans le groupe traité et 1102 non traités, il n'y a eu aucun décès dans aucun groupe. Le nirsevimab semble donc efficace à 65% sur les bronchiolites à VRS sans efficacité sur la mortalité des nourrissons d'après ces données en vie réelle.

 

3/ Pneumologie

Une revue systématique s'est intéressé à l'impact du Ramadan chez les patients avec une maladie respiratoire chronique. Bien qu'il y ait peu d'études, il semble que le Ramadan n'influe pas sur le risque d'hospitalisation ou autre critère de jugement clinique. Les auteurs recommandent un bon contrôle des maladies avec une optimisation du traitement de fond avec des prises aux horaires permises. Ils recommandent aux patients ayant besoin de traitements de courte durée d'action en journée de suspendre le jeûne. Ils rappellent que la CPAP, la VNI et l'oxygénothérapie sont compatibles et ne doivent pas être arrêtés. Les vaccins sont également possibles et doivent être réalisés pour éviter une décompensation. Enfin, le tabagisme étant interdit, cela peut être un moment adapté pour essayer un sevrage, les substituts en patch étant autorisés.

 

4/ Neurologie

Peu de temps après leurs recos sur le traitement chronique de la migraine, le collège américain de médecine propose des recommandations pour le traitement de crise. Les auteurs recommandent d'utiliser un triptan en plus d'un AINS en cas de migraine non soulagée par les AINS (ou triptan + paracetamol si non soulagé par paracetamol). L'argumentaire rentre un peu plus dans les détails, celles qu'on avait vues ici sont plus précises et la comparaison entre triptans a été vue ici.

 

5/ Hématologie

Le JAMA publie une revue sur la leucémie myéloïde chronique (LMC) définie par la présence d'un chromosome Philadelphie (= mutation BCR: ABL1). Les patients sont pour 50% à 60% asymptomatiques au moment du diagnostic, suspecté devant une splénomégalie ou une anomalie de la NFS avec souvent plus de 15 000 leucocytes, des myélocytes, métamyélocytes, PN Basophiles et une thrombocytose. Les symptômes peuvent être asthénie, anorexie, amaigrissement ou une dyspnée. Le diagnostic peut être géré en ville en dehors des signes de sévérité : leucocytes > 50 000, asthénie, fièvre, douleurs abdominales, priapisme. Le diagnostic reposera sur la biopsie ostéo-médullaire. Le traitement nécessitera ensuite des inhibiteurs de tyrosine kinase.

 

6/ Endocrinologie

Un article de Diabetologia propose une méthode pour évaluer la fréquence souhaitable du suivi ophtalmologique chez les patients diabétiques. L'objectif étant à la fois de réduire le fardeau lié à la prise en charge de la maladie et de ne pas trop espacer pour éviter un retard diagnostic. Les recommandations britanniques proposent un fond d'oeil tous les 2 ans en cas de faible risque de rétinopathie et annuel sinon. Cette étude propose un score simple pour aider à décider chez des patients avec un FO normal : s'il y a 0 à 3 points, le FO est tous les 2 ans, et s'il y a 4 points ou plus, il est recommandé annuellement :


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A la semaine prochaine ! (ou à demain au congrès!)

@Dr_Agibus et @DrePétronille