lundi 22 février 2016

Dragi Webdo n°85: IPP et démence, pioglitazone, hépatite C (reco), Variation d'HbA1C/Fructosamine, infections et diabète, dépistage diabète gestationnel

Bonsoir! Je vais m'efforcer d'arriver à publier avant demain matin, histoire que les lecteurs du lundi matin aient leur lecture du petit déjeuner. Pas mal de choses ont été publiées cette semaine, la sélection a donc été particulièrement difficile. J'espère qu'elle vous plaira!

1/ Pharmaco-vigilance

Les inhibiteurs de la pompe à proton sont malmenés ces temps ci. Il y a à peine un mois, une étude retrouvait qu'ils étaient associés à des insuffisances rénalesUne étude de cohorte prospective allemande à retrouvé que chez des patients de plus de 75 ans, le risque de démence était augmenté de 44% en cas de traitement par IPP. Une raison de plus pour réévaluer régulièrement leurs prescriptions.


2/ Santé publique

Une des autres pathologies très étudiée en ce moment est l'autisme. Les américains se sont posés la question d'un dépistage systématique précoce, chez les enfants de 18 à 30 mois par des questionnaires type m-CHAT. Ils ont conclu au fait qu'un tel dépistage n'était pas recommandé en l'absence de signes repérés par le médecin ou par la famille.


3/ Cardio-vasculaire

Le "gros" article de la semaine ne concerne pas la France, étant donné que la pioglitazone a été retirée du marché. Mais l'article est trop intéressant pour que je n'en parle pas. Un essai contrôlé randomisé publié dans le NEJM a testé la pioglitazone après un infarctus ou un AIT chez les patients non diabétiques avec insulino-résistance. L'étude retrouve qu'après un suivi médian de 4,8 ans, le médicament réduit les infarctus du myocardes et AVC (fatals ou non) de 24% (9% vs 11,8%). Il n'y avait pas de différence en terme de mortalité, d'hospitalisation, ni d'effets secondaires grave, sauf pour les fractures qui étaient supérieurs dans le groupe pioglitazone. Voici mes commentaire sur cette étude publiée suite à un congrès de spécialistes qui risque de vouloir nous  vendre la molécule. D'abord, sur les patients inclus: des patients non diabétiques avec une insulino-résistance. Il aurait pu s'agir de patients en pré-diabète, mais les auteurs ont préféré se baser sur une mesure d'insulinémie et de glycémie à jeun (index HOMA-IR) ce qui est peu évident en pratique courante. Ensuite, le fait qu'il n'y ait pas de différence de mortalité est vendu comme un succès. Je le vois plutôt comme un échec pour le traitement. Les effets indésirables connus tels que l'augmentation des cancers vésicaux n'est pas retrouvée dans l'étude, pas plus que les insuffisance cardiaques. Sur l'efficacité, il faut donc noter un NNT annuel de 172 patients (qui répondent aux critères d'inclusion, et donc ce ne sont pas tous les patients ayant eu un AIT ou un infarctus). Donc, on essaye un médicament dans une sous catégorie de patients pour trouver un bénéfice mineur. Au fait, je vous ai dit que le labo fournissait gracieusement le médicament et le placebo?


4/ Infectiologie

Cette partie sera courte. Deux informations à vous communiquer seulement. La première concerne l'infection à virus Zika devient à déclaration obligatoire en métropole et en territoire d'océan indien (pas dans les territoire français d’Amérique).

La deuxième actualité concerne les infections à VHC dont les recommandations de prise en charge ont été publiées par la société française d'hépatologie. Du point de vue du généraliste, il faut retenir que le traitement est recommandé pour TOUTE HEPATITE C, mais que la priorité va aux patients avec fibrose. Donc avant d'adresser au spécialiste, le bilan initial peut comporter la recherche des diagnostiques différentiels et les co-infections: alcool, syndrome métabolique (dyslipidémie et diabète), hépatite B, VIH, hémochromatose, hépatites auto-immunes et maladies cholestatiques chroniques. Le reste du bilan comprend le génotypage et la charge virale C qu'il n'est pas nécessaire de surveiller en l'absence de traitement. Enfin, l'évaluation de la fibrose se fait par moyen non invasif, la biopsie n'étant pas nécessaire dans la grande majorité des cas.


5/ Diabétologie

Grosse partie diabétologie pour finir. D'abord, le JAMA revient sur l'HbA1C dans le suivi du diabète et remontre qu'il s'agit d'un très mauvais marqueur du fait de sa variabilité en fonction de nombreuses conditions, notamment les hémoglobinopathies. Le cas clinique parle d'un patient diabétique très déséquilibré mais avec une HbA1C de 7%. Les solutions proposées sont le suivi par la glycémie à jeun ou par le dosage de la fructosamine, reflétant les glycémies du mois précédent (N= 200-285µmol/L). 


Je ne sais pas trop ce que ça vaut dans le sens où je n'ai pas de références, mais c'est concordant, alors je vous mets le tableau de correspondance que j'avais récupéré en stage d'interne (et je ne sais pas s'il s'agit de glycémie à jeun ou moyennes dans la colonne de gauche): 



Ensuite, le Lancet Diabetes and Endocrinology revient sur le risque infectieux des patients diabétiques. Les auteurs retrouvent grâce à une cohorte de patients de plus de 65 ans, une augmentation du risque de pneumopathie de 130%, d'infection urinaire de 28% et d'infection cutanée de 30% en cas d'HbA1C supérieure à 8,5% par rapport à des patients avec une HbA1C inférieure à 7%. Il n'y avait pas de différence pour ceux entre 7 et 8,5%. On savait que les bactéries aimaient le sucre, et qu'au delà de 8%, les évènements cardiovasculaire étaient augmentés. Cette étude ne change donc pas grand chose à la pratique, mais incite à être vigilant chez les patients "mal contrôlés". (J'ai failli oublié de dire que le labo Lilly avait financé l'étude...)

Enfin, une étude cout-efficacité irlandaise portant sur le dépistage du diabète gestationnel a été menée en soins primaires et secondaires. Les auteurs retrouvent que le dépistage systématique en centre de soins secondaire est plus cout-efficace qu'en soins primaire. En France, il est recommandé de dépister uniquement les patientes avec facteurs de risque de diabète gestationnel, mais j'avoue avoir de nombreux résultats d'HGPO qui reviennent, suite à des prescriptions de spécialistes. Peut être n'ont ils pas tort de les faire... Une étude cout-efficacité française serait bienvenue, bien que ce type d'étude soit encore rare dans notre pays.


Voilà! Merci de m'avoir lu une fois de plus, et bienvenue aux nouveaux lecteurs! Pour ceux qui se disent qu'il y a BEAUCOUP trop de choses dans ces Dragi Webdo pour tout retenir, mais que les infos y sont pourtant très utiles, n'hésites pas à utiliser l'ami google! Il retrouve très bien les articles qui m'intéressent et que j'ai oublié en cherchant "medicalement geek + le sujet de votre choix"!
A la semaine prochaine,

@Dr_Agibus

6 commentaires:

  1. J'ai retenu que la déclaration d'une maladie à Zika est maintenant obligatoire.
    J'ai retenu aussi que 80% des infections par Zika sont inapparentes et que la symptomatologie est floue et qu'il y a des réactions croisées positives des tests avec d'autres arboviroses ( Dengue etc ).
    Donc déclaration obligatoire d'une maladie mal systématisée.
    ?????

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    1. C'est à peu près ça. Mais si un diagnostic est fait par RT-PCR motivée par un syndrome viral en retour de voyage en zone d'endémie (cf Dragi Webdo 83). C'est peut êtreà cause du diagnostic difficile avec réactions et symptomatologies croisées que la DO n'est pas recommandée aux Antilles et Guyane. Cette DO est à visée épidémiologique et permet de voir si un foyer apparait en métropole, vu qu'on a pas de moyen spécifique de traiter l'infection ou quoi...

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  2. Bonjour, avez vous un avis sur cet appareil pour le suivi voire le diagnostic du diabète: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3817891/ ou http://www.diabetologie-pratique.com/journal/article/0012529-interet-pratique-de-sudoscan-une-technique-innovante-pour-lexploration-de-la. Merci.

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    1. Bonjour, je ne connaissais pas. Sensibilité de 75% spécificité de 85%. A vue d'oeil ça doit être un peu mieux que les moyens classiques. Le monofilament semble avoir une sensibilité de 66 à 91% et une spécificité de 34 à 86%, et le diapason semble faire un peu mieux. Compte tenu du cout de 35 000$ de l'appareil, je pense que ça ne vaut pas le coup.

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  3. Pour la fructosamine dans les cas d'Hémoglobinopathies, il semble que le dosage ne soit pas bien standardisé comme l'hbA1c, et donc que l'interprétation su résultat soit un petit peu délicate (MG comme toi, j'ai posé la question à un confrère diabétologue). Il faudrait donc tenir compte de la technique de dosage et de la norme de ton laboratoire....

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    1. Je suis d'accord, mais ça donne un ordre d'idée, pour voir si les glycémies sont très élevées ou expliquer des symptômes d'hypoglycémies malgré une HbA1C à 8%.

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