C'est le CENTIÈME Dragi Webdo!! Si on m'avait dit que j'en écrirait autant, je l'aurai peut être cru, mais j'aurai pensé que j'étais cinglé. Et maintenant, je sais que je le suis... Pour célébrer ce numéro spécial, parlons un peu de la médecine d'il y a 100 ans... J'avais récupéré il y a quelques temps un charmant ouvrage "La nouvelle médecine familiale", 800 pages, 8ème édition, par le Dr Petit et publié en au début du XXème siècle, en 1938 peut être... (c'est pas clairement écrit). Je vais donc mettre en parallèle chaque sujet abordé dans ce Dragi Webdo avec les thérapeutiques mises en places pour la même maladie au début du siècle précédent.
Mais avant de commencer, je voudrais reparler de nombre de sujets nécessaire à traiter (NNT). Souvent, dans les articles, j'en viens à calculer les NNT s'ils ne sont pas énoncés pour voir de façon plus "pragmatique" l'efficacité du traitement. Et, souvent encore, je râle un peu en disant qu'il faut traiter est de 200 patients patients par an pour sauver une vie. Mais voyons un peu les NNT d'interventions "valides":
On voit bien qu'en dehors de l'arrêt du tabac, de l'activité physique et du contrôle tensionnel avec diurétiques, les NNT des autres traitements sont assez élevés: en post infarctus, 120 pour les bêta-bloquants et 143 pour l'aspirine, et plus de 2000 pour les AVK en cas de fibrillation auriculaire!
Si vous vous intéressés aux autres NNT pour mettre en parallèle les interventions "novatrices" à des interventions plus anciennes, je ne peux que vous recommander le site "The NNT"!
1/ Pharmacovigilance
Commençons avec un traitement de l'HTA: la rilménidine qui, (comme tous les antihypertenseurs centraux) n'ayant pas de bénéfice démontré en terme de morbi-mortalité cardiovasculaire, voit son remboursement abaissé à 30%. Cette molécule peut garder son intérêt dans le cadre d'un traitement transitoire avant bilan hormonal étant donné qu'elle n'interfère pas avec le système rénine-angiotansine-aldostérone.
Au début du siècle l'HTA la tension normale était définie comme avoisinant 140-150 de systolique et le traitement: repas et sobriété! Et quand des préparations étaient nécessaires, voici ce qui était proposé:
Dans les angines bactériennes et les infections urinaires, le céfaclor fait un retour fulgurant! Cette céphalosporine de 1ère génération voit son SMR devenir "important" compte tenu des résistances croissantes pour les autres antibiotiques. Cet antibio n'était plus utilisé, justement parce qu'il y avait trop de résistances. Cette situation illustre bien l'avenir de l'infectiologie: une rotation des antibiotiques pour que ceux qui ne sont plus efficaces le redeviennent dans quelques années.
Dans l'ouvrage que je vais citer tout au long de ce billet, l'angine est une pathologie bénine, en dehors du risque d'albumine dans les urines, le traitement des angines blanches étant le même que celui des angines rouges (notez la place des lavages de gorge et de l'antisepsie du nez à al vaseline stérilisée):
L'ANSM revient sur les risques des antidépresseurs pendant la grossesse. Il semblerait que l'utilisation des inhibiteurs de recapture de la sérotonine (et de la noradrénaline) expose le foetus à un risque d'hypertension de l'artère pulmonaire et augmente le risque de trouble neuro-développementaux comme l'autisme chez l'enfant.
Le livre ne parle malheureusement pas de iatrogénie pharmacologique et il n'y a pas non plus de chapitre sur la dépression... On se consolera avec quelques formules pour la neurasthénie et la névrose:
Une série de cas a retrouvé des apnées du sommeil sévères chez les patients traités par baclofène. Ainsi, 4 cas ont été déclarés comme ayant eu un SAOS sévère, disparaissant après l'arrêt du médicament. Certes, 4 cas, c'est peu pour pouvoir affirmer l'imputabilité, mais la réversibilité à l'arrêt du traitement ne peut être négligée. Dans tous les cas, les bénéfices d'un sevrage en alcool sont probablement plus important qu'un SAOS qui sera réversible à l'arrêt du traitement soit: quand le sevrage alcoolique sera obtenu et prolongé, soit en cas d'échec du traitement.
Le traitement de l'ivresse aiguë était assez intéressant... Peut être que si on coupait le lobe de l'oreille aux jeunes gens amenés bourrés à l’hôpital le vendredi soir, on aurai une diminution rapide de la consommation! (notez qu'alcool est mis dans la colonne: "poison") Et ci-après, le remède "miracle"!
La surveillance cardiaque est indispensable pour les patients sous méthylphénidate. Le BMJ a publié un article sur cette molécule et retrouve une augmentation du risque d'infarctus et de troubles du rythme cardiaque, et ce notamment dans les 2 premiers mois de traitement qui devraient donc être particulièrement surveillés. Les risques d'AVC, d'insuffisance cardiaque et d'HTA n'étaient pas modifiés.
Là, pour le coup.... je fais choux blanc!
2/ Cardiovasculaire
La société des "médecins thoraciques" américains a publié des recommandations sur la prise en charge des maladies thrombo-emboliques veineuses. Et beaucoup de changements sont recommandés. D'abord, ils recommandent un traitement préférentiel par anticoagulant oral direct (AOD) préférentiellement aux AVK (ça commence mal, vous allez me dire... Mais la suite est mieux!). Le traitement des embolies pulmonaires et phlébites avec facteur déclencheur est de 3 mois, mais en l'absence de facteur déclencheur le traitement proposé doit être d'une durée étendue (c'est à dire sans date d'arrêt prévue) si le risque de saignement est faible ou modéré (notamment en cas de récidive). Le point le plus intéressant concerne les phlébites distales, en l'absence de symptômes sévères ou de risque d'extension, ils recommandent une surveillance échographique toutes les 2 semaines, en l'absence de FDR d'extension:
(1) D-dimères particulièrement élevés
(2) thrombose extensive (>5cm de long sur plusieurs veines, >7mm de diamètre maximum)
(3) thrombose proche des veines proximales
(4) absence de facteur déclencheur
(5) cancer actif
(6) antécédent de phlébite ou d'embolie pulmonaire
(7) patient hospitalisé
Le traitement anticoagulant est alors recommandé seulement si le thrombus s'étend (même s'il reste confiné aux veines distales). En cas d'embolie pulmonaires à faibles risque, ils confirment les recommandations de l'ESC qui proposait un traitement ambulatoire selon le score PESI. Enfin, pour les thromboses récurrentes sous anticoagulants, ils proposent un traitement par HBPM dont la dose peut être majorée de 25%-33% par rapport aux doses classiques (et se prononcent contre les filtres cave).
(1) D-dimères particulièrement élevés
(2) thrombose extensive (>5cm de long sur plusieurs veines, >7mm de diamètre maximum)
(3) thrombose proche des veines proximales
(4) absence de facteur déclencheur
(5) cancer actif
(6) antécédent de phlébite ou d'embolie pulmonaire
(7) patient hospitalisé
Le traitement anticoagulant est alors recommandé seulement si le thrombus s'étend (même s'il reste confiné aux veines distales). En cas d'embolie pulmonaires à faibles risque, ils confirment les recommandations de l'ESC qui proposait un traitement ambulatoire selon le score PESI. Enfin, pour les thromboses récurrentes sous anticoagulants, ils proposent un traitement par HBPM dont la dose peut être majorée de 25%-33% par rapport aux doses classiques (et se prononcent contre les filtres cave).
Mon petit manuel du jour a des solutions pour les phlébites et embolies pulmonaires, sont la sémiologie est bien décrite. Il faut 6 semaines à l'organisme pour résorber un thrombus, immobilisons donc le patients 40 jours!
Le BMJ a publié une étude portant sur les migraines. Chez une cohorte de plus de 100 000 femmes de 25 à 42 ans, les migraines augmentaient, en analyse multivariée, le risque d’infarctus du myocarde de 39%, d'AVC de 62%, et de mortalité cardiovasculaire de 37%!! Donc, si les migraines ne contrindiquent pas l'instauration d'une contraception par oestro-progestatifs avant 35 ans d'après la HAS (seules les migraines avec aura le font), il faut probablement quand même se méfier de l'aggravation des ces migraines en les réévaluant. D'autre part, compte tenu du risque cardiovasculaire augmenté, le traitement de la crise devrait être préférentiellement l'ibuprofène et le naproxène, qui augmentent moins le risque cardiovasculaire que les autres AINS (selon la revue prescrire).
Je ne pourrais malheureusement vous dire si la préparation qui suit augmente le risque cardio-vasculaire ou pas, faute d'essai cliniques publiés en 1938:
3/ Voyageurs
Les recommandations du voyageur 2016 du HCSP ont été publiées au BEH cette semaine. La principale modifications que j'ai remarquée réside dans le traitement préventif pour les voyages de plus de 3 mois. Il est recommandé un traitement de 6 mois, puis, discontinu selon la saison a mettre en place avec un médecin local. Notons qu'ils ont oublié de mettre à jour la vaccination anti Hépatite A qui est toujours présenté en 2 injections.
Au début du siècle, le paludisme était déjà pas mal connu et le traitement préventif par quinine 1 jour sur 2 semblait efficace (l'auteur souligne l'importance de l'observance!)
4/ Neurologie-psychiatrie
L'académie de médecine américaine (ACP) recommande les thérapie cogitivo-comportementales en première intention du traitement de l'insomnie chronique. Ce n'est qu'en cas d'échec que les traitements médicamenteux doivent être proposés, après discussion avec le patient pour évaluer leur balance bénéfice risque. J'avais lu quelque part que l'efficacité de ces traitement était en moyenne d'ajouter 1 heure (et c'est tout!) au temps de sommeil....
Le traitement avec une balance bénéfice risque la plus favorable est probablement celui consistant à mettre des cônes de houblon dans son oreiller. Diverses préparations sont également proposés, certains avec de l'absinthe, d'autres avec du pavot. J'ai préféré cette dernière car j'aime bien la valériane dans l'insomnie:
5/ Hépatologie
Enfin, des recommandations européennes sur la prise en charge de l'hépatopathie non alcoolique. Malgré ce qui peut être recommandé par endroit, aucun traitement spécifique n'ayant démontré de réel bénéfice. Les recommandations de prise en charge initiale sont assez intéressantes, avec un bilan comportant: les enzymes hépatiques et l’échographie si elles sont élevées, une NFS, une recherche de diabète, le cholestérol, et éventuellement un bilan martial (ferritine et coefficient de saturation), une recherche de maladie cœliaque, de dysthyroïdie, de syndrome des ovaires polykystiques, voire d'autres maladies hépatiques rares. Voici leur algorithme en cas de patient avec "syndrome métabolique":
Et pour finir, voici ce qui est dit sur l'insuffisance hépatique. Visiblement, les connaissances étaient encore peu précises par rapport à ce qu'on sait aujourd'hui, mais la cure de raisin est certainement très bonne, et l'éviction de l'alcool également (l'ouvrage rappelle que le vin et la bière contiennent de l'alcool, on ne sais jamais...)
Voilà pour cette semaine, j'espère que ce retour sur la médecine à travers les âges vous a intéressé. Je doute cependant de pouvoir revenir 200 ans en arrière pour le Dragi Webdo 200, ou sinon, il faut que je me mette dès maintenant à chercher un ouvrage de l'époque...( quoi que... tout se traitait par des saignées, nan?) Merci de me lire et bonne semaine, et à bientôt!
@Dr_Agibus
PS: je décline toute responsabilité en cas d'utilisation de ces potions en 2016 (elles sont surement périmées). Allez voir le médecin-moderne!
PS: je décline toute responsabilité en cas d'utilisation de ces potions en 2016 (elles sont surement périmées). Allez voir le médecin-moderne!
Merci pour le site "the NNT"
RépondreSupprimerTrès instructif.
petit lapsus dans le chapitre cardiovasculaire: AOD (anticoagulant oral direct) et AVK et non AVC
RépondreSupprimersinon , c'est toujours aussi utile et intéressant
continue!!!
kristof
Je crois que j'ai totalement dérapé sur cette phrase! C'est corrigé, merci!
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