Bonjour! Comme annoncé la semaine dernière, il y aura beaucoup de cardiologie avec le congrès américain qui a été intéressant de ce que j'ai pu voir. J'ai quand même du sélectionner, sinon ça aurait été beaucoup trop long (déjà là....) Bonne lecture!
1/ Pharmacovigilance
Pour commencer, un article du BJGP revient l'association entre contraception hormonale et troubles psychiatriques. En effet, ces contraceptions pourraient être associées à davantage de syndromes dépressifs et de suicides. Y penser quand on ne trouve pas de cause à une baisse de moral...
J'ai vu passé la question sur les réseaux sociaux: il y a bien une association retrouvée entre antidépresseurs IRS et malformations congénitales d'après une étude récente avec des risques relatifs de 1,17 à 1,2 selon les molécules). Mais on est sur des mégacohortes et 9 millions de naissances ont été suivies, ce qui explique la significativité des résultats (on a pas les chiffres absolus).
Les 2 classes réellement efficaces dans le diabète sont les analogues du GLP-1 et les inhibiteurs de SGLT-2. Le BMJ a comparé leurs effets indésirables: plus d'amputation avec iSGLT-2 et plus d'acidocétose. Donc commencer par un analogue du GLP-1 semble être une bonne idée.
2 Cardiologie
La société américaine de cardiologie a publié des nouvelles recos concernant les dyslipidémies. Elles sont pas mal, à vu d’œil puisque déjà, il n'y a pas d'objectif de LDL en règle général (en gros, sauf en prévention secondaire où l'intensification des traitements se faisait pour un LDL > 0,7g/L), ce qui est en accord avec les études.
- Pour commencer, les statines forte dose sont: atorvastatine 40-80, rosuvastatine 20-40; les statines à doses modérées sont notamment: simvastatine 20-40, atorvastatine 10(-20), rosuvastatine (5-)10 et pravastatine 40(-80); les statines faibles doses sont notamment: simvastatine 10, pravastatine 10-20.
Un bilan préthérapeutique évaluant le risque de douleurs musculaire, l'état hépatique et le risque de diabète est à considérer avant de débuter un traitement.
- Le score évaluant le risque est le score américain AHA/ACC qui évalue les infarctus et AVC fatals et non fatals ainsi que la mortalité cardiovasculaire. Il prend en compte les antécédents familiaux et le diabète. On peut approximativement passer au SCORE européen évaluant la mortalité cardiovasculaire en le divisant par 4 (parce que la morbi-mortalité correspond à environ 4 fois la mortalité. Ainsi le haut risque européen >5% correspond bien au haut risque américain >20% décrit dans ces recos)
- En prévention secondaire: à tout âge
Les américains considèrent désormais les antécédents cardiovasculaires non à très haut risque et ceux à très haut risque (c'est à dire avec 2 évènements majeurs ou 1 évènements majeur et 2 conditions associées, cf tableau): l'intérêt est de dire que si le LDL n'est pas inférieur à 0,7g/L chez ceux à très haut risque, il y a une indication aux anti-PCSK-9. Sinon, il est recommandé un traitement maximal toléré par statine de forte dose, avec ajout éventuel d'ezetimibe chez les moins de 75 ans (au delà de 75 ans: pas de cible).
- En prévention primaire: entre 40 et 75 ans (hors diabète)
Si le LDL est > 1,90g/L, il y a une indication de traitement, par statine forte dose dans l'idée d'une hypercholestérolémie familiale. Le Score de Dutch n'est pas calculé, mais peut l'être avant 40 ans pour discuter d'un traitement en cas d'antécédent familiaux d'accident cardiovasculaire précoces.
Sinon, la grande nouveauté est cette phase de "Risk discussion with the 10-year risk score". En gros, il est vraiment dit qu'il faut voir avec le patient s'il souhaite un traitement qui peut être proposé à partir d'un risque >7,5%, avec une statine modérée ou une statine forte en cas de risque > 20%.
La 2ème nouveauté concerne les patients avec un risque entre 7,5% et 20% qui seraient indécis. Alors que l'USPSTF vient de dire que le score calcique (CAC) n'avait pas fait ses preuve chez les patients asymptomatiques, la société savante de cardiologie propose de l'utiliser pour faire pencher la balance décisionnelle: CAC égal 0 => pas de traitement, CAC entre 1 et 99 => statine si âge > 55 ans, et si CAC >100 => statine. (on voit quand même les différence d'avis entre les sociétés savantes...) Les autres critères, cliniques pouvant faire pencher la balance pour un traitement dès 7,5% de risque sont les antécédents familiaux précoces, le syndrome métabolique, une insuffisance rénale chronique, une pathologie inflammatoire comme le VIH, les connectivites..., l'antécédent de prééclampsie et les origines comme l'Asie du sud est)
- En prévention primaire: après 75 ans
Il est acceptable d'initier un traitement selon les modalités précédentes (sauf si le LDL est < 0,7g/L) et il est également acceptable d'arrêter le traitement en cas de fragilité, multimorbidité et espérance de vie réduite. (je passe sur le score calcique qui peut être utiliser pour limiter les traitements s'il est égal à 0, car je doute de voir un patient avec un CAC à 0 après 75 ans...)
- Chez les patients diabétiques de 40 à 75 ans, une statine modéré est
indiquée quelque soit le risque cardiovasculaire, mais une évaluation du
risque cardiovasculaire est une option. A 75 ans, un traitement bien
toléré peut être poursuivi (on a vu il y a quelques semaines qu'il y avait un bénéfice possible jusqu'à 85 ans)
- Concernant l'hypertriglycéridémie
Il est recommandé de ne traiter que par règles hygiénodiététiques! Sauf en cas de risque cardiovasculaire >7,5% où un traitement par statine peut être entrepris. Si l'hypertriglycéridémie persiste en étant supérieure à 10g/L, un traitement par fibrate peut être entrepris à la place ou en plus d'une statine (dans ce cas: fenofibrate)
Cela concorde assez avec les recos françaises, sauf sur le "objectifs" que les américains n'ont pas en prévention primaire. On vise une baisse de 30% ou 50% selon le risque et on espère l'atteindre. Si on ne l'atteint pas, il n'est pas forcément recommandé d'intensifier en prévention primaire, et c'est cohérent avec les études sur le sujet.
L'étude REDUCE-IT qui testait de acide eicosapentaénoïque (EPA) c'est ç dire des oméga-3 à très forte dose chez des patients avec hypertriglycéridémie entre 2,0g/L et 5,0g/L sous statine, en prévention secondaire (70% des inclus) ou primaire à très haut risque (diabète + autre facteurs de risque). 8000 patients ont été inclus. Il y avait une baisse d'évènements cardiovasculaires de 25%, (NNT= 20) mais aussi de la mortalité cardiovasculaire de 20%, soit un NNT de 112 patients traités pendant 5 ans (pas de baisse de mortalité globale cependant). Il y avait plus de passage en fibrillation auriculaire sous EPA (NNH= 71) . Bref, après avoir été "mis" puis "retirés" des recos post-infarctus, les oméga-3 vont ils faire leur retour? Dans les limites de cette étude, certains déplorent le placebo utilisé: une huile qui aurait pu réduire l'absorption des statines dans le bras "placebo"... c'est trop problématique pour être négligé... Heureusement d'autres études sur le même principe sont en cours.
Toujours concernant les omega-3 à faible dose cette fois ci, (1g/j), mais 25 000 patients inclus: pas d'efficacité sur les évènements cardiovasculaires dans l'étude VITAL (un peu moins d'infarctus, de façon isolée mais on ne conclura rien sur ces analyses secondaire). La même étude évaluait l'efficacité de la vitamine D qui ne réduisait pas non plus le risque de cancer ou d'évènements cardiovasculaires. Là encore, une analyse secondaire: la mortalité par cancer après exclusion des 2 premières années de suivi (on considère qu'un cancer survenant dans les 2 ans était préexistant), est diminuée significativement... On ne conclura rien non plus là dessus.
3/ Pneumologie
Un article de l'ERJ a étudié l'impact de la toux qui se chronicise. Ils ont retrouvé qu'elle était associée à une altération de la qualité de vie et à plus d'arrêt de travail. Cependant, cela n'augmentait pas le risque de dépression. Bref, les anti-tussifs ne sauvent pas le vie, mais on se demande s'ils pourraient améliorer la qualité de vie de certains patients.
4/ Gynécologie
Une étude du JAMA internal medicine retrouve que la présence de kystes ovarien simple n'est pas associée au risque ultérieur de cancer de l'ovaire. Il n'apparait donc pas utile de les surveiller avec cet objectif. L'USPSTF s'était déjà prononcé contre le dépistage systématique du cancer de l'ovaire par échographie.
Concernant le dépistage par mammographie, cette étude retrouve une survie spécifique plus longue chez les patientes ayant participé au dépistage organisé par mammographie par rapport à celles n'y participant pas: il y avait une réduction de 60% des décès par cancer du sein à 10 ans chez celles participant. Les auteurs disent arriver à réduire fortement le temps d'avance diagnostic grâce au suivi très prolongé sur 10 à 20 ans. La réduction de mortalité peut elle être lié à un investissement du patient dans sa santé et non au seul dépistage? On ne nous parle nulle part de mortalité globale. Donc, cette étude ne me convainc pas pour autant, si jamais des spécialistes de la question veulent la commenter c'est avec plaisir!
5/ Urologie
La Cochrane revient sur les syndromes douloureux pelviens chroniques (ex prostatite chronique) et trouvent que les mesures associées à une moindre douleur étaient: l'acuponcture, être circoncis (pas sur que de façon prospective ça marche...), l'activité physique, les thérapies par ondes de choc et la thermothérapie trans-rectale.
6/ ORL
Pour finir, le BMJ parle de la prise en charge de surdité. L'article revient sur les tests de Rinne et Weber et propose les diagnostics de surdité de perception ou de transmission. Ce qui est important, ce sont les "red flags": l’installation en moins de 72h = urgences, post traumatique = urgences, surdité, unilatérale = éliminer un neurinome par IRM, surdité avec otorrhée ou paralysie faciale = avis rapide, progressive s'aggravant ou profonde (>95dB mais j'ai pas de quoi mesurer au cab) = avis ORL .
Bonne fin de week end à tous! A dans quelques jours à Tours pour ceux qui vont au congrès du CNGE, et sinon à la semaine prochaine pour un autre Dragi Webdo!! (Et pensez à vous abonner pour ne pas rater les billets trop en avance comme celui ci, ou trop en retard comme probablement celui de la semaine prochaine!)
@Dr_Agibus
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