dimanche 14 juin 2020

Dragi Webdo n°274 : Goutte (Reco), mesure continue du glucose (reco), varicocèle, TDR/angine, punaise de lit, migraine/risque CV

Bonjour ! Je vous présente sans plus attendre les études que j'ai repérées cette semaine. Bonne lecture!

1/ COVID-19

Les articles sur le COVID se font un peu plus rare. Voici une étude rétrospective chinoise de 2800 patients hospitalisés pour COVID, qui retrouve que les patients hypertendus ont un risque de mortalité supérieur aux non-hypertendus. Parmi les patients hypertendus, ceux traités par IEC ou ARA2 n'avaient pas de sur-risque de mortalité par rapport à ceux traités par d'autres traitements. Mais les patients hypertendus sans traitement avaient un risque de mortalité augmenté.

En accord avec l'étude précédente, l'EMA (Agence européenne du médicament) déclare également qu'il est préférable de poursuivre les traitements par IEC et ARAII devant l'absence d'argument pour une association avec des formes plus graves chez les patients prenant ces traitements dans les études récentes.

Une étude du BMJ s'est intéressé aux équipements personnels de protections. Ainsi, 400 médecins, infirmiers et infirmières étaient équipés de masques, de gants, de lunettes de protection, d'écrans faciaux et de blouses pour effectuer leur travail quotidien comportant des gestes invasifs sur des patients COVID+ pendant 2 semaines de confinement. A la fin des 2 semaines, aucun des professionnels de santé n'avait de symptômes, ni de PCR nasopharyngée, ni de sérologie revenant positive pour le SarsCov2. Je pense qu'un autre test une semaine après aurait pu être utile, mais les auteurs disent qu'ils voulaient pouvoir faire profiter rapidement la communauté de ces informations. Soit dit en passant les tests sérologiques utilisés étaient plutôt fiables avec une sensibilité et une spécificité de 88% et 99% pour les IgM et 98% et 98% pour les IgG, respectivement.


2/Rhumatologie

Quelques mois après les recos américaines, ce sont les recommandations françaises concernant la goutte qui viennent d'être publiées par la société française de rhumatologie grâce à une méthode Delphi comprenant 9 rhumatologues, 3 généralistes, 1 néphro, 1 cardio et 1 patient (les rhumatologues ayant la majorité des 2/3, pas sûr que les avis des autres soient très entendus dans un Delphi...). Il y a des préconisations générales: informer le patient sur le fait que la goutte est lié à des cristaux d'acide urique, et qu'il va falloir modifier les habitudes de vie pour faire baisser l'uricémie. La 1ère recos stipule de traiter tous les patients avec goutte par un traitement de fond......... recos grade D, niveau de preuve 4= avis d'expert qui n'est pas retrouvé dans les recommandations (qui disent si > 2 crises/an ou tophus ou maladie rénale chronique), 2ème reco: baisser l'uricémie à 50µmol/L(300mg/L) ou à 60µmol/L (360mg/L) si pas possible. 3ème reco: l'allopurinol est le traitement de 1ère ligne (sauf si DFG<30mL/min, ça c'est en faveur du febuxostat). 4ème reco: la colchicine à la dose de 0,5mg à 1mg/j doit être prescrite pour 6 mois pour éviter les crises induite par l'introduction d'un traitement hypo-uricémiant. 5ème reco: dépister les comorbidités rénales, cardiovasculaires et métaboliques (avis d'expert également). Ces recos augmentent donc la prescription d'hypo-uricémiants sans que les preuves suffisantes soient apportées et ne parlent pas de la réelle controverse dans le traitement de la goutte: colchicine ou AINS en première ligne dans la crise de goutte.


3/ Infectiologie

La Cochrane a publié une revue concernant l'efficacité et la sécurité des tests de diagnostic rapide dans le cadre des angines à streptocoque A (On en avait déjà parlé ici). Je rappelle rapidement les 3 approches principales: 1/ française: streptatest avant antibio, 2/britannique: antibio selon le MacIsaac, 3/ nordique: pas d'antibio sauf abcès ou phlegmon. Donc, cette revue retrouve que l'utilisation de TDR réduit de 25% la prescription d'antibiotique par rapport à l'utilisation de la clinique seule, mais cela ne permet pas de réduire la dispensation (donc les gens n'achètent pas directement l'antibio quand il est prescrit. On voit que c'est pas une étude faite en France!). Il est possible qu'il y ait moins de complications infectieuses chez les patients ayant eu un TDR (mais le niveau de preuve est incertain puisque ce résultat n'est pas significatif). Les approches 1 et 3 semblent les plus cohérentes avec les données de la science retrouvant que l'efficacité de l'antibio se résume à une réduction de 16 heures des symptômes.

Parlons des punaises de lit grâce au NEJM avec cet article rédigé par des auteurs de IHU Méditerranée Infection. Le diagnostic est évoqué devant des piqures répétées et des lésions papuleuses ou vésiculeuses, sur les zones non couvertes, au nombre de 3 à 5 ("petit déj", "déjeuner", "diner" pour ces bestioles là aussi), qui sont parfois décrites comme "en amas" ou "linéaires" ou "en zigzag" mais en fait, ce n'est pas du tout spécifique des punaises de lit (Zut!). On retrouve surtout leurs traces sur les matelas, les tapisseries, les câbles électriques, en repérant leurs déjections sous forme d'amas de petits points noirs ou les exosquelettes des punaises. Les patients ont un impact psychologique de ces piqures liées au prurit important et aux troubles du sommeil associés. La prise en charge consiste utiliser l'aspirateur pour aspirer les punaises de lit (et jeter le sac d'aspirateur après l'avoir fermé), puis de laver les vêtements et la literie à 60°C (seulement si des traces d'infestation ont été trouvées dessus, pas la peine de laver TOUS les vêtements). Il ne faut pas utiliser d'insecticides commerciaux car les parasites y sont résistants. Y'a des recos françaises sur le sujet visiblement: ici.


4/ Neurologie

On avait déjà parlé du risque cardiovasculaire majoré par les migraines. Cet article du JAMA revient dessus à travers une étude de cohorte ayant suivi des femmes pendant environ 20 ans. Ainsi, parmi ces femmes âgées de 55 ans en moyenne, 8% des femmes avaient des migraines sans aura et 5% avec aura. Le risque d'évènements cardiovasculaire lié aux migraines avec aura été supérieur à celui lié à l'obésité, similaire à celui lié à l'HTA, à l'hérédité cardiovasculaire et à l'hyperlipidémie, et inférieur à celui lié au diabète et au tabagisme actif.


5/ Urologie

Un article parle maintenant des varicocèles, présents chez 20% des hommes. En augmentant la température testiculaire, ils peuvent altérer la spermatogenèse, abaisser production de testostérone et conduire à une infertilité. Ceux de grade 1 et 2 sont généralement asymptomatiques. Le diagnostic est clinique et l'échographie plutôt à utiliser en cas de symptômes (après avoir éliminé une infection si le symptôme est la douleur). Le traitement (chirurgical ou embolisation) n'est nécessaire qu'en cas d'inconfort ou d'infertilité, avec une efficacité d'environ 80%.


6/ Diabétologie

Des recommandations internationales (avec l'aide du laboratoire Abott, créateur du FreeStyle libre) ont été publiées pour interpréter les mesures continues du glucose (MCG). Les capteurs se sont développés et les société savantes sont en faveur d'un suivi par MCG plutôt qu'ASG (auto-surveillance glycémique). Il faut retenir 3 indicateurs: 
- le TIR: time in range (intervalle cible): 0,7g/L à 1,8g/L.
- le TBR: time below range (temps en hypoglycémie)
- le TAR: time above range (temps en hyperglycémie)
L'objectif le plus courant est que le patient soit à 70% dans l'intervalle cible, et passe maximum 4% du temps en hypoglycémie. 
Voici donc les objectifs en figure ainsi que la correspondance avec l'HbA1C (qui est approximative parce qu'être à 70% dans la cible mais 20% en dessous et 10% au dessus, c'est pas pareil que d'être 25% au dessus et 5% en dessous.....) Bref, vous le voyez venir, ces cibles relèvent du consensus d'expert et n'ont pas été évaluées sur des critères cliniques. Je pense que les 4% maxi en hypo sont adaptés, mais si on se fie à la corrélation donnée entre HbA1C et TIR, un TIR vers 60% serait un objectif plus adapté  pour avoir une hbA1C vers 7,5%, que 70% minimum. Encore une fois, si c'est 70% des valeurs qui sont bonne et qu'il y a bien moins de 4% d'hypo, il est possible que ça soit en effet un "bon objectif" mais des études devront être menées pour le confirmer (de ce que j'ai vu du congrès de l'ADA, ces objectifs permettraient de réduire les rétinopathies chez les patients diabétiques de type 1, mais j'ai pas vu d'autre études avec outcomes cliniques)


L'étude DIRECT avait montré que les RHD strictes permettaient de guérir du diabète avec un NNT entre 2 et 3. Cette étude randomisée a été répliquée au Qatar et publiée dans le Lancet Diab&Endoc, chez 140 patients diabétiques de type 2 depuis moins de 3 ans : 12 semaines avec un régime à 800Kcal, puis 12 semaines de rééducation alimentaire, 10 000 pas par jour à effectuer et 150min d'activité physique par semaine. La rémission du diabète était définie comme une HbA1C < 6,5%, mais le critère de jugement était principal était la perte de poids à 1 an. La perte de poids a été significativement plus importante dans le groupe intervention (-12kg vs -4kg), sur l'HbA1C seulement 0,6% d'écart (mais c'est significatif en faveur du groupe traitement), et le taux de rémission de diabète a été de 61% vs 12% (NNT=2).


Merci de m'avoir lu cette semaine encore, à la semaine prochaine !

@Dr_Agibus

2 commentaires:

  1. Le paragraphe sur le TDR n'est pas très clair.
    On diminue de 25% la prescription d'antibiotiques mais la conclusion est que les stratégies 2 et 3 sont plus accord avec la science ?
    Et comment la dispensation peut être la même si dans la plupart des pays l'amoxicilline n'est pas OTC ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Probablement que les patients ne vont pas les chercher: différence prescription/délivrance. Ce n'est pas clair en effet.
      C'est les stratégies 1 et 3, en effet, faute de frappe. Merci

      Supprimer