dimanche 28 février 2021

Dragi Webdo n°302 : Covid (vaccins Pfizer/AZ, troubles ORL/HAS, zinc), diverticulite, allergies alimentaires, examen des seins, prégabaline, antidépresseurs

Bonjour ! Merci à tous ceux qui ont fait un don et qui ont envoyé des messages d’encouragement et de remerciement suite au billet de @DrePetronille de la semaine dernière! Ce blog et les DragiWebdo resteront gratuits, mais c'est vrai qu'une fois par an je rappelle l'existence de la cagnotte sur le côté de la page (ou ici). Merci encore et voici les actualités de la semaine: bonne lecture !


1/ Pharmacovigilance:

L'ANSM s'inquiète du risque de dépendance et de complications lié au mésusage de la prégabaline et fait modifier les modalités de prescription à partir du 24 mai. Il sera désormais nécessaire de la prescrire sur ordonnance sécurisée pour une durée maximale de 6 mois. Les britanniques avaient déjà commencé à prendre des mesures pour limiter ces risques il y a quelques mois.

 

2/ Covid-19

Une fiche concernant les troubles du goût et de l'odorat a été publiée par la HAS. Concernant les troubles olfactifs, la fiche présente un protocole de rééducation à donner au patient. Le recours à une IRM des voies olfactives et à la consultation ORL n'est nécessaire qu'après 2 mois de symptômes. Concernant les troubles cochléo-vestibulaires, la consultation ORL est systématiquement requise pour une évaluation, parfois en urgence si surdité.


Rapidement, un essai contrôlé randomisé publié dans le JAMA Open retrouve que ni le zinc ni la vitamine C n'améliorent le Covid, donc "on" peut arrêter les protocoles "maison" non éprouvés.

On avait parlé du vaccin Pfizer efficace à 95%. L'utilisation massive de ce vaccin en Israël a été étudiée dans une étude de cohorte appariant 600 000 patients vaccinés avec autant de patients non vaccinés. Après 1 seule dose l'efficacité sur une infection symptomatique et sur une infection sévère étaient d'environ 60% et atteignaient 90% après la 2ème dose. L'efficacité sur la mortalité était de 74% après la 1ère dose (il n'y avait plus assez de patients suivis pour savoir après la 2eme car le principal problème de cette étude est le suivi moyen de 15 jours des patients).

Complétons maintenant les données sur le vaccin AstraZeneca (on en avait parlé ici aussi). Cette étude du Lancet a publié des données plus complètes que précédemment. Ainsi, après 2 doses, l'efficacité de ce vaccin atteindrait 66% (NNT= 53). Cependant, les auteurs suggèrent qu'une seule dose permettrait d'avoir une protection de de 76% dans les 3 mois suivant cette première injection. Parmi les patients ayant eu 2 injections, la réponse serait meilleure lorsque la 2ème dose était effectuée à plus de 12 semaines de la 1ère. Bien que ce soit le titre de l'article, ces données sont issues d'analyses exploratoires, donc ça limite un peu leur portée quand même.

 

3/ Cardiovasculaire:

Le NEJM avait publié un "n of 1 trial" il y a quelques semaines pour étudier l'effet nocebo des statines. Le BMJ publie une étude similaire où chaque patient avait 6 séquences de 2 mois pour recevoir "atorvastatine" ou "placebo" avec une évaluation à chaque période des douleurs musculaires par échelle visuelle analogique. Il n'y avait pas de différence à l'EVA entre les périodes avec statine ou placebo, pas de différences sur les activités quotidiennes et le nombre d'arrêts des traitements pour "douleurs insupportables" était similaire dans les 2 groupes.

 

4/ Gastro-entérologie :

Les recos HAS recommandaient en 2017 de traiter les diverticulites par de l'amoxiciline + acide clavulanique en 1ère intention et fluoroquinolone + métronidazole en 2ème intention alors que d'autres sociétés savantes préféraient C3G + métronidazole. Un article d'Annals of internal medicine pose la question du traitement antibiotique des diverticulites aiguës en ambulatoire et retrouve que le traitement par Amox+A.Clav n'expose pas à plus d'hospitalisations ou de chirurgies que l'association FQ+metronidazole. Cette dernière était cependant pourvoyeuse de plus d'infections à Clostridium difficile.

Le BMJ aborde les allergies alimentaires en analysant une base de données britannique nationale. Entre 1998 et 2018, l'incidence des hospitalisations pour anaphylaxie alimentaire est passée de 1,2 à 4,0 pour 100 000 personnes par an, cependant le risque de décès a diminué en passant de 0,7% à 0,2% des cas d'anaphylaxie. Chez l'enfant, le lait est le 1er allergène en cause alors que ce sont les fruits à coque chez l'adulte.


5/ Psychiatrie:

Une étude qualitative a interrogé les généralistes australiens sur l'arrêt des traitements anti-dépresseurs utilisés à long terme. Pour les médecins interrogés, l'arrêt ne peut s'entendre que dans le cadre d'une décision médicale partagée avec prise en compte du contexte social (qui doit être stable) et de la préparation du patient à l'arrêt du traitement médicamenteux. Les médecins ont rappelé qu'il est souvent plus facile de renouveler un traitement que de creuser pour accompagner la déprescription. 

 

6/ Gynécologie:

On avait parlé plusieurs fois de l'examen clinique des seins dont les performances sont très faibles et qui n'est pas recommandé dans le suivi des femmes à l'étranger (il l'est seulement en France... bref, passons). Le BMJ publie un essai contrôlé randomisé "examen clinique des seins tous les 2 ans" versus "pas de dépistage du tout", en Inde, pendant 20 ans, chez des patientes âgées de 35 à 64 ans et c'est très intéressant puisqu'il n'y a pas de mammographie recommandée entre 35 et 50 ans (comme en France, enfin, ici la moitié des femmes ont déjà eu une mammographie avant 50 ans en l'absence de recommandation... bref passons). Les auteurs retrouvent que:

  • sur l'ensemble des patientes: pas de différence de mortalité spécifique au cancer du sein ni de mortalité globale
  • chez les patientes de moins de 50 ans: pas de différence de mortalité spécifique ni de mortalité globale
  • chez les patientes de plus de 50 ans: réduction de la mortalité spécifique, mais pas de la mortalité globale.

Ainsi, l'examen clinique des seins avant 50 ans n'apporte rien en dehors d'éventuels surdiagnostics ou diagnostics plus précoces (on a quand même un suivi à 20 ans là!). Si on y trouve un éventuel intérêt, ce serait après 50 ans, où le dépistage par mammographie est déjà en place et la comparaison mammo versus examen clinique a déjà été débattue ici: c'est plutôt soit la mammo soit rien. Cet article ne permet donc pas de trouver une solution aux problèmes de surdiagnostics liés à la mammographie, mais semble surtout montrer une fois de plus les limites de l'examen clinique des seins (cela ne veut pas dire qu'on ne trouverait pas de cancer en le faisant, mais ce n'est pas pertinent sur des critères cliniques autres que le stade des cancers. Et cela ne veut pas non plus dire qu'il ne faut rien faire: une auto-surveillance reste recommandée, mais ce n'est pas non plus une auto-palpation régulière comme c'était recommandé avant et qui ne l'est plus car cela conduisait à des surdiagnostics et des examens inutiles).

 

6/ Diabétologie:

Dans la prise en charge du diabète, on arrive maintenant assez vite aux analogues du GLP-1 qui baissent la mortalité. Les inhibiteurs de SGLT-2, et notamment l'empagliflozine, ont montré une réduction de la mortalité. Cette étude de Circulation étudie le bénéfice de l'ajout d'un iSGLT-2 par rapport à l'ajout d'un sulfamide à une thérapie par aGLP-1 dans une étude de cohorte avec appariement des patients sur un score de propension. Les auteurs retrouvent que l'ajout d'un iSGLT-2 réduisait d'avantage les hospitalisations pour insuffisance cardiaque (NNT=130) et le critère composite cardiovasculaire (infarctus, AVC et mortalité toute cause) (NNT=325). Aucun des sous critères du critère composite n'était diminué significativement, donc le bénéfice de cette bithérapie semble quand même incertain au vu des effets secondaires des analogues de SGLT2. Cependant c'est quand même probablement mieux qu'une autre bithérapie avec des antidiabétiques oraux. Il aurait été intéressant de comparer avec l'ajout d'insuline basale, plus neutre, plutôt que l'utilisation de sulfamides qui peuvent favoriser les évènements cardiovasculaires en majorant les variations glycémiques.
 


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Ah, j'oubliais, dans l'Equipe, retrouvez bien évidemment le classement de la ligue 1, avec le PSG qui, après sa victoire 4-0 au pays de la moutarde, reprend la 2ème place du classement en repassant devant l'OL qui fait match nul dans l'Olympico face à l'OM suite à un penalty très controversé en faveur des marseillais (ben oui, il parait qu'il faut lire l'équipe pour ne pas être un bon scientifique!)

A la semaine prochaine !

@Dr_Agibus (et @DrePetronille pour le quali et la relecture)

9 commentaires:

  1. Sur le dépistage par examen clinique des seins dans l'article du BMJ, vous omettez de dire que la mortalité par cancer du sein est diminuée de presque 30% chez les femmes de plus de 50 ans et qu'il n'y a pas d'excès de cancers au final. Il faut donc abandonner le dépistage mammographique, au profit de l'examen clinique et d'autres examens d'imagerie. https://www.linkedin.com/pulse/maintenir-le-d%C3%A9pistage-mammographique-organis%C3%A9-est-criminel-corcos/

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    1. Très intéressant, mais il faudrait se mettre d'accord avec ces avis divergents...

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    2. La diminution de la mortalité spécifique de 30% dans un sous groupe est quand même un critère faible en effet. Cette étude n'étudiant pas la mammo il est dur de conclure dessus et l'étude du sur/sous diagnostic me semble quand même difficile également avec cette étude. L'étude à laquelle j'ai renvoyé comparant l'ECS et la mammo est plus intéressant. Je dirais que la mammo systématique tous les 2 ans est a abandonner au profit d'un dépistage qui reste encore à déterminer. Un dernier point est la différence d'épidémiologie, un des principaux facteurs de risque de cancer du sein étant la consommation d'alcool qui n'est pas la même en France et en Asie.

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    3. L'étude a un suivi de 20 ans, ce qui fait qu'on peut étudier le surdiagnostic, et il est clair qu'il est très faible. L'étude Taïwanaise à laquelle vous faites référence non seulement n'était pas un essai randomisé, mais surtout seulement 12% du groupe dépisté par l'examen clinique avait effectivement adhéré au dépistage. Quant à l'alcool, il faudrait que toutes les Françaises en boivent en quantité massive pour expliquer une telle différence entre la France et l'Inde.

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    4. Je pensais au surdiagnostic de lésions bénignes entrainant biopsies et suivis inutiles anxiogènes, je n'ai pas été assez précis. Merci pour les éléments que vous avez apporté pour la réflexion.

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  2. Justement, l'HAS2017 avait plutot dit PAS d'AB sur la diverticulite sauf forme compliquée définie par "La diverticulite compliquée correspond aux complications locales : abcès péricolique, stades Hinchey II (péritonite localisée : abcès pelvien, abdominal ou rétropéritonéal), Hinchey III (péritonite généralisée purulente) et Hinchey IV (péritonite fécale)). "

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    1. Bonjour, la HAS dit pas d'antibiotique sauf signe de gravité (TA > 100mmHg, FR< 22, pas d'immunodépression, pas de grossesse, symptômes et inflammation peu marqués) ou persistance des symptomes, pas uniquement si complication, mais c'est pas si souvent que ça au final.

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  3. et Selon [Prescrire 2020 http://vps788967.ovh.net/www/nicbook/Biblio/Diverticulite/Diverticulite-Prescrire2020.pdf]:

    Immuno suppression, Tt Corticoïde ou AINS

    CRP > 150

    "présence d'autres affections"

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    1. Tout à fait, mais pendant les 3 semaines de symptomes "peu intenses avec CRP < 150" le patient a mal quand même. Du coup, je suis assez pour l'avis de la HAS car même s'il n'y a pas de complications supplémentaires ou d'hospitalisations, les antalgiques simples ne semblent pas soulager les patients.

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