lundi 21 juin 2021

Dragi Webdo n°318 : Covid (HCSP, EuroCDC), Score2 (ESC), douleurs pelviennes, migraines, observance (diabète, pneumo), dépression, CRP/infections respiratoires, erreurs diagnostiques

Bonjour ! Cela fait maintenant 7 ans que le Dragi Webdo existe, merci à tous les lecteurs! Cela fait également plus d'un an que le blog a été restructuré et que chaque billet est co-écrit par DrePetronille et Dr_Agibus (du coup, le nom du webdo n'est plus approprié...). La newsletter va bientôt changer d'aspect, Blogger ne permettant plus de passer par son hébergeur pour envoyer les flux par mail. Nous cherchons une solution pour maintenir les envois hebdomadaire aux abonnés. Et pour mieux vous connaître et répondre à vos besoins, voici le traditionnel sondage annuel auquel nous vous demandons de répondre si le coeur vous en dit (vous étiez près de 500 à répondre l'an dernier, on fait mieux cette année?). Cela nous permettra de faire le bilan à un an du nouveau blog et de préparer la rentrée ! Bonne lecture!


1/ Psychiatrie

Parfois, dans les dépressions résistantes, on voit des antipsychotiques co-prescrits aux antidépresseurs, peut être pour leur effet thymorégulateur si on suspecte un trouble bipolaire. Une étude retrouve une surmortalité chez ces patients avec antipsychotiques + antidépresseurs par rapport aux patients ayant 2 antidépresseurs (mais on avait déjà dit qu'il n'y avait pas de bénéfice clair à mettre un 2ème antidépresseur)

Un article publié dans la revue Nature a utilisé les données de la cohorte française de 5000 étudiants de plus de 18 ans i-Share dans laquelle 17,4% des filles et 16,8% des garçons ont exprimé des idées suicidaires. Les facteurs prédisant le plus le risque suicidaire étaient les pensées suicidaires, l'anxiété, les symptômes de dépression et le manque d'estime de soi.  Le manque d'estime de soi est un nouveau facteur et l'échelle de Rosenberg permet de l'évaluer. Pour l'anxiété, elle peut être évaluée par l'échelle de STAI-YB de Spielberger, pour la dépression, l'échelle PHQ-9 est conseillée (échelle la plus adaptée, on en avait parlé , mais elle ne permet pas de coter ALPQ003). 

Cet article taïwanais, publié dans la revue Helicobacter (oui elle existe!), met en évidence un surrisque de dépression dans les 30 jours suivant une éradication d'Helicobacter pylori par antibiothérapie en cas d'ulcère gastro-duodénal, et notamment après clarythromycine et/ou metronidazole (pour ce dernier, les troubles dépressifs pourraient survenir jusque 6 mois après l'antibiothérapie). Ainsi, peut-être faut-il prévenir les patients de ne pas hésiter à consulter en cas de symptômes dépressifs dans les suites du traitement (là encore, les auteurs conseillent l'échelle PHQ-9.

 

2/ Covid-19

Le HCSP a émis des recommandations concernant le retour au travail des patients à haut risque de Covid ayant reçu un schéma vaccinal complet. Chez les patients non fortement immunodéprimés, un retour au travail est possible après avis du médecin du travail dans la mesure où elles ne sont pas exposées à des fortes densités virales. Pour celles fortement immunodéprimée, il est proposé de poursuivre les mesures mises en place avant la vaccination (télétravail, poste aménagé ou arrêt de travail).

Concernant le nombre de doses vaccinales, j'ai trouvé dans le document du CDC européen que 11 des 25 autres pays européens recommandaient également une seule dose en cas d'antécédent de Covid, à effectuer souvent 6 mois après l'infection. Un seul pays ne recommande pas de vaccination en cas d'antécédent. Les 13 autres pays recommandent un schéma complet, parfois avec un délai après l'infection.

Cet article a décrit la population atteinte de Covid prouvé par PCR en soins de premier recours de mars à mai 2020 (Lyon). Il est intéressant de voir que les symptômes les plus fortement associés à un test positif étaient la perte du goût et de l'odorat (et encore mieux avec l'association des 2 symptômes). Les myalgies étaient plus fréquentes chez les patients avec un test positif. En revanche, dyspnée, mal de gorge, congestion nasale étaient plus fréquents chez les personnes testées négativement. L'accès au test PCR de cette période de 2020 n'était peut-être pas vraiment représentative de l'ensemble des personnes symptomatiques, avec à l'époque 35% de soignants testés parmi la population étudiée. 


3/ Cardiovasculaire

Deux articles viennent de paraitre sous l'impulsion de la société européenne de cardiologie. L'ancien HeartScore datant de 2003, validé chez les 45-65 ans et donnant le risque de décès cardiovasculaire à 10 ans vient d'être mis à jour. Le Score2 et le Score2-OP (old people), ont été publiés cette semaine et donnent le risque d'évènements cardiovasculaire fatals et non fatals à 10 ans. Le Score 2 est pour les 40-69 ans, et le score 2 OP pour les plus de 70 ans. On voit aussi que les seuils des risques faible, modéré et élevé est différent selon les âges: le haut risque est de 7,5% avant 50 ans, 10% jusqu'à 69 ans et 15% à partir de 70 ans. Malgré ce progrès, il est probable que ce nouvel outil conduise à une augmentation des personnes traitées en augmentant le nombre de patients à risque élevé. En effet, l'ancien score considérait qu'un patient était à haut risque à partir de 5%. Or il faut à peu près multiplier par 4 pour obtenir le risque de morbi-mortalité. Ainsi, dans le Score 2, le seuil du risque élevé aurait dû être situé à 20%, comme pour les calculateurs de risques américain (ASCVD) et britannique (Qrisk3). Un seuil 2 fois plus bas risque donc d'entrainer un surtraitement si les seuils ne sont pas réévalués dans les recommandations de l'ESC qui intègreront ces calculateurs. De plus, les modificateurs qui s'appliquaient à l'ancien score (par exemple x2 en cas d'antécédent familial cardiovasculaire précoce) ne s'appliquent peut être pas à l'identique dans le score 2.

 4/ Infectiologie

Une revue du BMJ revient sur l'intérêt de la CRP et de la PCT pour réduire la consommation d'antibiotiques dans les infections respiratoires de l'enfant. Il semblerait que leurs performances n'aient pas été déterminées en soins primaires, et donc il n'y a pas de preuve qu'il puisse être utile de les utiliser. Cependant, en soins urgent, chez des enfants non sévères avec une présentation équivoque, une CRP inférieure à 20 et un PCT inférieur à 0,5 rendent le diagnostic d'infection bactérienne peu probable et donc évitent le recours aux antibiotiques (et si supérieur à 80 et 2, respectivement, ça devient très probable).

 

5/ Douleur

Le JAMA présente une revue concernant le traitement aiguë des migraines. Rien de très neuf par rapport à la revue du Lancet d'il y a quelques semaines: 

  • les AINS sont efficaces et les triptans aussi. 
  • La combinaison du naproxène avec du sumatriptan est presque 2 fois plus efficace que l'utilisation d'un seul antalgique. 
  • Les nouveaux traitements oraux comme les grepants (rimegepant  et ubrogepant) et les ditans (lasmiditan) sont modérément efficaces chez les patients résistants aux triptants et AINS. 
  • Le tramadol est une option efficace avec un faible niveau de preuve. 
  • Les anti-émétiques ont également été évalués: la chlorpomazine, le métochlopramide et haldopéridol sont efficaces en injectables (mais pas sûr que la balance bénéfice risque vaille le coup).

Le JAMA aborde les douleurs pelviennes chroniques chez la femme qui affecteraient 25% des femmes. L'entretien doit évaluer les symptômes, leur retentissement dans la vie quotidienne, les comorbidités et les facteurs environnementaux et psychologiques favorisants. Les drapeaux rouges à rechercher sont des ménorragies après 40 ans, une masse abdominale, des saignements post coïtaux ou des rectorragies, ou une majoration de la douleur. Le bilan initial recherchera une grossesse (test urinaire), une vaginose et une IST (prélèvement vaginal), une infection urinaire (ECBU) et l'endométriose (échographie pelvienne). La prise en charge peut faire intervenir des myorelaxants, des antalgiques, des traitements hormonaux, et des traitements non pharmacologiques (kinésithérapie, acuponcture, chirurgie...), avec une évaluation à 4 à 8 semaines.


6/ Diabétologie

Des recommandations suisses concernant la prise en charge du diabète sont cohérentes avec celles des sociétés européennes et américaines de diabétologie. La metformine reste le traitement de 1ère intention en cas d'HbA1c < 10% (si >10%, l'insulinothérapie d'emblée est recommandée). Les auteurs recommandent des iSGLT2 quel que soit l'HbA1c si insuffisance rénale ou insuffisance cardiaque, et des aGLP1 ou iSGLT2 en cas de risque cardiovasculaire élevé ou très élevé. Quand aucune de ces pathologies n'est présente, ils recommandent les traitements en faisant pas prendre de poids, et notamment les aGLP1, et d'éviter les sulfamides. A quand la mise à jour des recos HAS dépassées ?

L'étude d'une cohorte de patients diabétiques avec dosage urinaires des médicaments a permis de comparer des patients "observants" (tous les médicaments étaient retrouvés dans les urines) et des patients "non observants" (au moins 1 traitement manquait dans l'analyse urinaire). Les auteurs retrouvent que 90% des patients étaient adhérents (ce qui est bien plus que les 50% habituels, mais le détail de l'observance est difficile à savoir avec les seules urines du fait de la demi-vie des traitements plus longue que le délai après une prise, ainsi, le test ne peut préciser les oublis ou les sauts de prise.) Les patients observants avaient un risque absolu de complications microvasculaires significativement plus faible de 15% et de complications macrovasculaires plus faible de 17%. Les observants avaient une HbA1c plus basse mais ils n'étaient pas significativement plus "à l'objectif d'HbA1c" que les non observants. Comme quoi, encore une fois, les objectifs ne sont pas l'élément permettant de réduire les complications.

Manger des pommes de terre ou ne pas en manger, telle est la question de cette revue de littérature qui a montré que manger des pommes de terre (consommation totale, cuites ou frites) augmenterait le risque de diabète de type 2 et de diabète gestationnel et ce avec un effet dose-dépendant, notamment pour les frites.  Il n'y a pas vraiment de significativité des résultats néanmoins, mais les auteurs ont l'air d'avoir retourné les résultats pour conclure à cette tendance... (Peut-être vaut-il mieux manger des tomates?)


7/ Pratique médicale et relation médecin-malade

Cet article publié dans PLoS One a mis en évidence que le principal critère de choix entre les différents vaccins contre la grippe par les généralistes était la disponibilité du vaccin, même si ce vaccin n'est pas considéré comme le plus approprié. Les stocks fluctuants restent un véritable problème pour proposer des soins de qualité conformes aux données de la science. 

Cet article s'est intéressé au risque d'erreur de diagnostic médical chez les médecins anglais par analyse rétrospective de 2100 dossiers. L'analyse par les relecteurs indépendants a mis en évidence 4,3% d'erreurs possibles ou confirmées, dont 72% qui résultaient de plusieurs défaillances parmi anamnèse, examen clinique, prescription d'examens, interprétation de résultats d'examens, suivi, et traçabilité. 37% de ces erreurs ont été évaluées comme ayant eu un préjudice modéré pour le patient (détresse physique ou psychologique, sans complication avec le temps) à sévère (impact prolongé dans le temps incluant les hospitalisations). Le plus souvent, les erreurs concernaient le système génito-urinaire et la dermatologie puis venaient le système digestif et l'endocrinologie. 

 

8/ Pneumologie

Cet article propose une boite à outils, créée suite à une revue de la littérature, pour évaluer la non adhérence au traitement des patients atteints d'asthme et de BPCO, par exemple chez les personnes ayant une maladie non contrôlée, des exacerbations fréquentes, une utilisation fréquente des inhalateurs à courte durée d'action. Les auteurs proposent un questionnaire, le TAI, validé, qui doit être proposé de manière non jugeante ("De nombreuses personnes ont des difficultés à prendre leur inhalateur en permanence. Puis-je vous demander .... ?"). En fonction du degré de non adhérence au traitement, les auteurs proposent des stratégies d'accompagnement en proposant l'inclusion d'aidants familiaux, l'association de la prise du médicament à une habitude quotidienne (ex: brossage de dents), la mise en place de rappels. Un plan personnalisé de soins limitant le nombre de traitements et expliquant les modalités d'administration peut être utile pour les patients ayant des difficultés à prendre le traitement. Enfin, pour les personnes récalcitrantes au traitement, l'entretien motivationnel avec éducation thérapeutique sur les bénéfices et les risques liés aux traitements, ainsi que l'histoire naturelle des maladies peut être utile pour aboutir à une décision médicale partagée. 


C'est fini! C'était encore un plaisir de croiser certain·es d'entre vous au congrès du #CNGE2021 de Bordeaux (puis qu'il y aura aussi un #CNGE2021 à Lille dans quelques mois). Vous pourrez trouver les #LT de nombreuses communications orales et de plénières sur Twitter par ici! D'ailleurs une des plénières concernait la communication du risque en santé et les outils d'aide à la décision, et voilà un article de cette semaine sur le sujet qui l'aborde aussi au travers des recommandations du NICE britannique.

En attendant le nouveau système de newsletter, vous pouvez toujours vous abonnez sur  FacebookTwitter et à la newsletter (mail) pour ne rater aucun billet. Pour cela, inscrivez votre adresse mail e-mail tout en haut à droite sur la page (sans oublier de confirmer l'inscription dans le mail intitulé "FeedBurner Email Subscriptions", qui vous sera envoyé et qui peut arriver dans vos spams)

A la semaine prochaine !

@Dr_Agibus et @DrePetronille

1 commentaire: