Syndromes dépressifs et troubles de l'humeur
1/ Recommandations
2021: La HAS a publié des recommandations concernant la prévention des conduites suicidaires chez l'adolescent. Le BITS est recommandé pour dépister les adolescents tout venant, et l'ASQ dans les consultations en lien avec la santé mentale. En cas de crise suicidaire, il est nécessaire d'évaluer l'urgence suicidaire (risque à court terme: idées, scénario, intentionnalité) et la vulnérabilité suicidaire (risque à moyen et long terme: facteurs de risques environnementaux, antécédents personnels et familiaux de suicide). Ces éléments permettent de déterminer si la prise en charge peut être ambulatoire ou hospitalière.
2/ Dépistage
- Vous sentez-vous souvent découragé(e) et triste ?
- Avez-vous le sentiment que votre vie est vide ?
- Êtes-vous heureux (se) (bien) la plupart du temps ?
- Avez-vous l'impression que votre situation est désespérée ?
- Vous sentez vous déprimé?
- Avez vous une perte d'intérêt pour les choses qui vous plaisaient avant?
Un article publié dans la revue Nature a utilisé les données de la cohorte française de 5000 étudiants de plus de 18 ans i-Share dans laquelle 17,4% des filles et 16,8% des garçons ont exprimé des idées suicidaires. Les facteurs prédisant le plus le risque suicidaire étaient les pensées suicidaires, l'anxiété, les symptômes de dépression et le manque d'estime de soi. Le manque d'estime de soi est un nouveau facteur et l'échelle de Rosenberg permet de l'évaluer. Pour l'anxiété, elle peut être évaluée par l'échelle de STAI-YB de Spielberger, pour la dépression, l'échelle PHQ-9 est conseillée (échelle la plus adaptée, on en avait parlé là, mais elle ne permet pas de coter ALPQ003).
Une étude de cohorte rétrospective américaine a analysé 60 000 patients ayant eu un dépistage de dépression en soins primaires, parmi lesquels 4000 (7%) avaient un syndrome dépressif majeur (PHQ-9 ≥ 10), et donc une indication à un antidépresseur. Il y a eu 40% des patients à recevoir un antidépresseur immédiatement suite au dépistage mais 70% en ont eu un dans les 8 semaines. Les facteurs associés à la prescription d'antidépresseurs étaient les idées suicidaires, l'âge jeune (< 30 ans notamment) et l’ethnie caucasienne (versus afro-américains et asiatiques).
Cette étude d'Annals of family medicine
a comparé des enregistrements vocaux de 10 000 patients qu'ils ont
soumis à une IA. Les patients étaient enregistrés pendant au moins 25
secondes en réponse a la question "comment était votre journée?". Ils
avaient également complété un PHQ-9 pour rechercher un syndrome
dépressif. Sur les échantillons vocaux, l'IA a réussi a repérer les
patients dépressifs modérés à sévères (PHQ-9 ≥10) avec une sensibilité
de 71% et une spécificité de 73%. C'est pas mal du tout, mais ça reste
relativement faible.
3/ Traitements pharmacologiques
Un
article canadien revient sur "ajout ou switch" d'antidépresseur. Pour
mémoire les bithérapies "efficaces" en soins primaire dans les
dépressions résistantes se font plutôt avec ajout de mirtazapine/miansérine à un IRS et pour discuter de switcher ou d'augmenter aux doses "optimales", on en avait parlé là.
Une autre grosse méta-analyse cette semaine, celle de l'efficacité des antidépresseurs. Ainsi, les auteurs retrouvent que l'amitriptyline est l'antidépresseur le plus efficace, les autres étant tous quasiment équivalents et plus efficaces que le placebo. Si on fait un peu attention, la seule différence significative entre les molécules concernerait une supériorité de l'amitriptyline par rapport à la fluoxétine. Sur le plan de la tolérance, l'agomélatine et la fluoxétine sont à privilégier et la clomipranine est la moins bien supportée. Ainsi, la fluoxétine semble être un bon premier choix de traitement, efficace et mieux supportée, avant d'aller essayer d'autres IRS ou de passer à l'amitriptyline qui semble être plus efficace.
![](https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzf7tVNP0BIFucOT-CavUBhRyBXeHMrp7pXbpE-gsG2YJr1-1mgQJ7TQ3Mq6f-v2jQdhzjf9f4F7AKBMN7grsTLnK0QB7w8_Kocn1nxIcAAHK57CMsVx5neYH-uF5bNSjHCBP9hwDUkp3w/s400/DMC+antidepresseur.png)
On a déjà parlé de la psilocybine dans le traitement de la dépression (cf ici). Le BMJ publie
une revue systématique sur ce traitement. Les 9 études incluaient 436
patients. Les auteurs retrouvent une efficacité significative de la
psilocybine dans la dépression primaire, mais surtout dans la dépression
secondaire (liée à une autre maladie), et principalement porté par les
fortes doses. Cependant, bien que les tailles d'effet soit assez
importante et que les études incluses soient à faible risque de biais,
les auteurs montrent un funnel plot asymétrique témoignant d'un biais de
publication d'études "négatives" sur le sujet. [edit:
des erreurs méthodologiques ayant pu conduire à une sur-estimation du
bénéfice ont été retrouvées. Les auteurs sont en train de répondre à
l'éditeur qui verra les suites à donner à cet article. cf ici.]
Une revue de la Cochrane s'est intéressée à l'arrêt des antidépresseurs prescrits pour dépression ou anxiété. Les auteurs retrouvent avec un faible niveau de preuve que l'arrêt brutal ou même progressif augmente le risque de rechute. Ce qui permet d'obtenir un arrêt satisfaisant c'est d'accompagner un arrêt progressif d'une psychothérapie (entre 40% et 75% de succès). Dans les études, les baisses étaient effectuées sur des périodes de moins de 4 semaine en général. Un des problèmes de l'analyse des articles résidait dans le fait que les symptômes de rechute se confondent souvent avec les syndromes de sevrage.
Le BJGP aborde l'arrêt des antidépresseurs et notamment des IRS. Étant donné leurs syndromes de sevrages fréquent proportionnel à la durée d'utilisation et invalidants (sauf pour la fluoxétine qui a une demi vie longue), les auteurs argumentent en faveur d'une diminution progressive des doses de 25% à chaque palier. En effet, il est souvent supporté de baisser les doses élevées que les faibles doses (car les récepteurs ne sont plus saturés à faible dose). Compte tenu des demi-vies des IRS, il est donc préférable de réduire la dose quotidienne en s'aidant de formes buvables si possible, plutôt que de faire des sauts de prise (de type prendre le médicament 1jour sur 2). Enfin, une des difficultés peut être de faire la différence un syndrome de sevrage et une rechute dépressive. La reprise du traitement à un dosage supérieur corrigera rapidement le syndrome de sevrage, mais pas la rechute.
Une étude qualitative a interrogé les généralistes australiens sur l'arrêt des traitements anti-dépresseurs utilisés à long terme. Pour les médecins interrogés, l'arrêt ne peut s'entendre que dans le cadre d'une décision médicale partagée avec prise en compte du contexte social (qui doit être stable) et de la préparation du patient à l'arrêt du traitement médicamenteux. Les médecins ont rappelé qu'il est souvent plus facile de renouveler un traitement que de creuser pour accompagner la déprescription.
Nous avions décrit ici que les bithérapies d'antidépresseurs n'apportaient pas de bénéfice supplémentaire par rapport à une monothérapie. Cette revue systématique s'est intéressée aux différentes associations d'antidépresseurs et il semblerait que l'association d'un inhibiteur de recapture de monoamine (c'est à dire un IRS, un IRSNA ou un tricyclique) associé à un antagoniste des récepteurs alpha2 (c'est à dire la miansérine et la mirtazapine) soit plus efficace qu'une monothérapie en augmentant le taux de rémission et de réponse sans augmentation des sorties d'études dues au traitement. Il y aurait également un effet sur l'amélioration des symptômes dans le sous groupe des non répondeurs à une monothérapie. Donc, ce pourrait être une option, mais probablement pas sans recourir à l'avis d'un psychiatre.
Il y avait des doutes sur l'efficacité des antidépresseurs et
psychothérapies pour traiter la dépression chez les adultes avec
antécédent de traumatisme dans l'enfance. Cette revue systématique
confirme désormais qu'ils sont aussi efficaces en cas de traumatisme
qu'en l'absence de traumatisme, bien que dans la 1ère situation les
dépressions soient plus sévères.
Une étude du JAMA Psychiatry a
étudié l'association entre prescription d'acide folique et suicide. Les
auteurs retrouvent, dans une étude de cohorte, que les patients prenant
de l'acide folique avaient un risque suicidaire moindre que ceux n'en
prenant pas. Les auteurs ont aussi comparé le risque suicidaire chez les
patients prenant de la vitamine B12 pour avoir un "contrôle", et il n'y
avait pas de différence de risque de suicide chez ces patients. Ainsi,
il faudrait un essai randomisé pour savoir si l'acide folique réduit le
risque de suicide. L'introduction de l'article est intéressante, car les
auteurs citent une précédente étude retrouvant que l'alprazolam était
un des traitements associés à une augmentation des suicides et que la
mirtazapine, l'hydroxyzine, le disulfiram, la naltrexone et l'acide
folique étaient associé à une baisse de suicides.
4/ Traitements non pharmacologiques
Le BMJ a
étudié l'efficacité de l'activité physique dans la dépression. La
marche et le jogging étaient les sports les plus efficaces, autant que
les TCC, suivis de près par le yoga, le renforcement musculaire puis
l'aérobic. Enfin, notons que tous ces exercices physiques et les TCC
étaient cliniquement efficaces, alors que les IRS étaient supérieurs au
placebo sans apparaître comme lui étant cliniquement supérieurs.
En soins primaires, les traitements de l'anxiété et de la dépression n'ont pas d'effets très francs compte tenu de la population qui ne correspond pas à celles des grandes études de psychiatrie. Cependant, les thérapies cognitivo-comportementales sont un traitement efficace. Le problème, le prix des thérapeutes qui peut parfois poser problème...
5/ Burn out
6/ Trouble bipolaire
Le BMJ parle des traitements des troubles bipolaires. Les auteurs ont fait un tableau synthétique "parfait", donnant les bilans à faire dans le suivi de chaque traitement (Voici un extrait, sans le lithium parce qu'on le voit quand même très très rarement)
7/ En pédiatrie
2014: La HAS a publié des recommandations sur la prise en charge de la dépression de l'adolescent en 1er recours. On sait qu'il est difficile d'aborder de creuser la question avec un ado qui ne vient pas du tout pour ça. Repérer des signes lors de l'entretien, et utiliser les scores (disponibles en Annexe 5) tels que le TSTS-CAFARD et l'ADRS (qui est un peu long, je trouve) peuvent permettre d'aborder le sujet. Quand au traitement, la place des psychothérapies est prépondérante, le traitement médicamenteux, par fluoxetine uniquement, réservé aux épisodes dépressifs constitués sans amélioration après 1 à 2 mois de psychothérapie.
La cochrane revient sur les antidépresseurs chez l'adolescent. Ils pourraient avoir un intérêt pour réduire les symptômes de la dépression, notamment la sertraline, l'escitalopram, la duloxétine, ainsi que la fluoxétine.
Syndromes anxieux
2024: Le départements des vétérans américains a publié des recommandations concernant l'état de stress post traumatique. Les recommandations sont majoritairement de niveau de preuve "impossibilité de se prononcer" (comme pour savoir s'il faut proposer un psychothérapie aux patients exposés à un trauma) ou faible (comme l'utilisation de questionnaires de dépistage ou proposer une TCC en cas d'état de stress aigu). Ainsi, avec un niveau de preuve élevé, il est recommandé de traiter un ESPT par une TCC ou EMDR ou psychothérapie d'exposition prolongée. Quand un traitement médicamenteux est nécessaire, la paroxétine, la sertraline et la venlafaxine sont les seuls avec efficacité démontrée et il est recommandé de ne pas utiliser de benzodiazépines ou de cannabinoïdes. Enfin, avec un faible niveau de preuve, les auteurs suggèrent l'utilisation de prazosine dans le traitement des cauchemars de l'ESPT.
Une revue systématique du BMJ avec méta-analyse en réseau s'est intéressée aux traitements du trouble panique avec ou sans agoraphobie. Les benzodiazépines, inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) et antidépresseurs tricycliques étaient les traitements avec les taux de rémission les plus élevés malgré un risque d'effets indésirables élevé. La buspirone avait un taux d'effets secondaires particulièrement faible. Les IRS avaient au final la balance bénéfice/risque la plus favorable, notamment la sertraline et l'escitalopram.
On avait déjà eu un comparatif des traitements de l'anxiété ici. Voici une nouvelle revue systématique s'intéressant spécifiquement aux inhibiteurs de recapture de la sérotonine (IRS). Les données sont plutôt concordantes, avec l'escitalopram, le citalopram, la paroxétine, la duloxétine et venlafaxine qui sont les plus efficaces, mais les intervalles de confiance se recoupent presque tous et les traitements sont donc équivalents. La fluoxétine et la sertraline semblaient un peu moins efficaces.
Syndromes psychotiques
L'ANSM revient sur l'importance du suivi cardiovasculaire des patients sous anti-psychotiques. En effet, d'une part, les patients avec comorbidités psychiatriques sont à plus haut risque cardiovasculaire et d'autre part parce que ces traitements augmentent aussi le risque (via l'augmentation des dyslipidémies, du diabète, la prise de poids... qu'il faut donc surveiller)
Risque suicidaire
Concluons avec cet article du BMJ s'intéressant à l'évaluation et à la prise en charge du risque auto-agressif et suicidaire chez l'adulte jeune. Tout d'abord, les auteurs recommandent d'évaluer les comorbidités augmentant le risque suicidaire : antécédents de gestes auto-agressifs, antécédents de troubles psychiatriques, consommation de drogues ou d'alcool, violences sexuelles, séparation parentale ou décès d'un parent, stress a la maison ou a l'école/travail, s'identifier comme LGBT+. Les facteurs protecteurs sont un entourage présent, la religion, l'éducation et l'emploi. La principale chose à faire, est du domaine relationnel avec le patient : écoute empathique, non jugement, créer une relation de confiance, demander si de l'information peut être partagée avec les proches. Ensuite, il est nécessaire d'évaluer l'état mental actuel (risque suicidaire en tant que tel, moyens, intentionnalité, état de désespoir, expression faciale et autres éléments non-verbaux). Concernant l'évaluation du risque suicidaire, le NICE ne recommande pas l'utilisation d'outils comme les échelles de Beck, ni de catégoriser les patients en risque "faible", "modéré", "élevé" car 60-80% des suicides se produisent chez des patients catégorisés en "faible risque" 6 mois auparavant. Il ne faut pas hésiter à adresser au spécialiste en cas de récurrence des idées suicidaires, d'inquiétude du praticien, si le patient le demande ou si la détresse du patient augmente ou en cas de trouble psychiatrique sous-jacent suspecté. Enfin la prise en charge doit être personnalisée, avec un plan d'action permettant de reconnaître les signes d'alerte, la conduite à tenir (utiliser des distractions, contacter ses proches, le médecin, aller aux urgences..). Sur le plan thérapeutique, les psychothérapies sont à initier comme des TCC. Le recours aux médicaments doit être mesuré, dans le sens où les intoxications médicamenteuses volontaires sont fréquentes; il faut donc limiter les quantités disponibles par les patients en fractionnant la délivrance par exemple.
Le BMJ a publié une revue concernant le risque suicidaire de l'adolescent. Les taux de suicides sont plus importants à l'adolescence chez les hommes, les sujets noirs, les personnes LGBT ou non certaines de leur identité sexuelle. Comme le recommandait la HAS, le questionnaire le plus validé dans la littérature et à utiliser pour dépister le risque suicidaire est le questionnaire ASQ en 4 questions (Se 95%, Sp 90%):
Alors que la santé mentale est une priorité nationale, cet essai randomisé a évalué un programme de prévention du suicide en médecine générale versus soins courants. Dans cette étude, le programme de prévention a permis de réduire de 25% le nombre de tentatives de suicides à 3 mois (4,5 vs 6 pour 10 000 patients vus). Le programme comportait: un dépistage le PHQ-2, complété si positif par un PHQ-9 permettant d'évaluer le risque suicidaire avec la question 9, puis une évaluation avec la C-SSRS (mais ça c'est long à faire). Ce qu'on peut retenir, c'est le dépistage avec PHQ-2, puis évaluation du risque suicidaire et mis en place du plan de sécurité:
Il ne faut pas croire que parce qu'un patient sort d'hospitalisation en psychiatrie, c'est qu'il ne court plus aucun risque. En effet, une étude du Jama Psychiatry a étudié le risque suicidaire à court terme chez les patients sortis d'hospitalisation psychiatrique. Le risque était particulièrement élevé pour les patients dépressifs sévère, bipolaires, schizophrènes et en cas d'antécédent d'une autre hospitalisation dans les 6 mois. Cependant, l'étude retrouve aussi que tout patient hospitalisé en psychiatrie à un risque supérieur de suicide à la population générale: donc à revoir rapidement par le médecin généraliste ou le psychiatre pour une réévaluation du risque suicidaire.
Troubles du comportement alimentaire
- Êtes-vous satisfait de vos habitudes alimentaires ?
- Vous arrive-t-il de manger en cachette ?
- Votre poids affecte-t-il la façon dont vous vous sentez ?
- Des membres de votre famille ont-ils souffert d'un trouble alimentaire ?
- Souffrez-vous actuellement ou avez-vous déjà souffert d'un trouble alimentaire ?
Troubles du sommeil
2020: Le conseil scientifique luxembourgeois propose des recommandations sur la prise en charge de l'insomnie. Il s'agit d'un algorithme plutôt pratique pour progresser dans les étiologies possibles et proposant une conduite à tenir à chaque étape, mais une fois encore, la référence source date de 2006, donc pas très récent.
2020: Des experts ont publié des recommandations concernant l'utilisation de la mélatonine dans les pathologies psychiatriques. On y voit que la mélatonine à des doses inférieures ou égales à 1mg donnée 6 à 2h avant le sommeil a un effet chronobiotique favorisant l'endormissement, et à des doses de 2 à 5mg donnée 30min avant le coucher a un effet soporifique. Il n'y a pas d'effet clair sur les pathologies sous-jacentes, mais le traitement permettrait d'améliorer les troubles du sommeil.
2017: Les recommandations sur les troubles du sommeil sont rares, mais un article du JAMA permet de revenir sur le sujet en s’appuyant sur une bibliographie récente. Ainsi, après évaluation du sommeil les traitements pharmacologiques type benzodiazépine (notamment le zolpidem) peuvent être proposés pour 3-4 semaines maximum dans l’insomnie aigue (ça colle avec les recos sur le zolpidem !). Pour l’insomnie chronique, les thérapies cognitivo-comportementales sont le traitement de première intention, les médicaments n’intervenant qu’en complément si la TCC seul est insuffisante.
2017: La HAS a publié des recommandations sur la prescription de benzodiazépines. Absolument rien de neuf dans la fiche (prescriptions la plus courte possible, risque des benzo, bénéfices très faibles etc...). Les points de nouveauté concernent la prescription sur ordonnance sécurisée du zolpidem, ainsi qu'une petite phrase pour les sujets âgés traités depuis longtemps disant qu'il ne faut pas s'acharner à les arrêter parce que le déséquilibre lié à l'arrêt serait plus dangereux que les risques de la poursuite. Il y a certains grand messages qui s'en dégagent: une prescription limitée à 4 semaines, car aucun traitement médicamenteux n'est adapté à l'insomnie chronique, l'importance de tout mettre en oeuvre pour arrêter les traitements longs et inutiles, sachant qu'un baisse de posologie est déjà un bon point. Et peut-être peut on dire aux patient que l'effet attendu est un gain d' une petite heure de sommeil par nuit, seulement.
2016: L'académie de médecine américaine (ACP) recommande les thérapie cogitivo-comportementales en première intention du traitement de l'insomnie chronique. Ce n'est qu'en cas d'échec que les traitements médicamenteux doivent être proposés, après discussion avec le patient pour évaluer leur balance bénéfice risque. J'avais lu quelque part que l'efficacité de ces traitement était en moyenne d'ajouter 1 heure (et c'est tout!) au temps de sommeil....
Un article canadien rappelle les étiologies de troubles du sommeil chez le sujet âgé. L'interrogatoire doit. notamment rechercher des douleurs, une dyspnée, des mictions nocturnes, l'environnement non propice au sommeil, un partenaire avec. des troubles du sommeil ainsi que les médicaments qui agissent de manière directe ou indirecte sur le sommeil:
Autres pathologies
Le BMJ aborde les troubles de personnalité. Leur prévalence atteindrait 10% de la population générale, 50% de la population suivie en psychiatrie et 70% des patients hospitalisés en psychiatrie (avec 10-20% de personnalité borderline). Les principaux indicateurs pouvant faire suspecter un trouble de personnalité sont :- des troubles de l'affectivité (changements d'humeur rapides, humeur maussade, anxiété, colère, détachement...)
- un dérèglement des impulsions (comportements à risque, promiscuité sexuelle, abus d'alcool et de drogues)
- des problèmes interpersonnels dans sa vie : relations turbulentes et instables (borderline), dépendance, isolement, et dans la relation de soins (utilisation accrue des ressources, sentiment d'impasse, prescriptions inhabituelles, consultations à rallonge)
- une mauvaise réponse aux traitements éprouvés d'autres troubles mentaux (anxiété, dépression, syndrome de stress post-traumatique...)
- il peut s'y ajouter des indicateurs mineurs: bizarreries, des symptômes dissociatifs, des actes auto-agressifs, des symptômes médicalement inexpliqués, des troubles émotionnels et du comportement dans l'enfance, des antécédents de traumatisme, une déficience dans l'environnement familiale.
Article intéressant. Quelques remarques :
RépondreSupprimerUne remarque concernant les "rechutes" après arrêt du traitement. Vous évoquez rapidement ce biais dans votre article alors qu'il est cependant crucial. Les symptômes du sevrage aux antidépresseurs sont presque identiques à ceux de la dépression. Par conséquent l'ensemble des études évaluant les "rechutes" en comparant un groupe ayant arrêté un antidépresseur contre un groupe poursuivant un antidépresseur sont sans valeur. Il faudrait comparer un groupe de personnes rétablis ayant pris un placebo contre un groupe de patients rétablis après prise d'un antidépresseur pour s'assurer qu'il s'agit en effet d'une réelle rechute et non d'un syndrome de sevrage. De plus les antidépresseurs peuvent également avoir des effets secondaire de type extra-pyramidaux permanent comme de l'akathisie tardive, ce qui invalide encore plus le design de ces études d'évaluation des "rechutes".
L'on pourrait même aller plus loin : n'importe quel médicament induisant une dépendance physique montrera probablement qu'il faut maintenir le patient sous traitement avec ce type de design. Imaginez que je prenne un groupe de personnes dépendants aux opiacés. Je randomise ce groupe en un groupe A et un groupe B. J'arrête brutalement les opiacés dans le groupe A et je maintiens les opiacés dans le groupe B. Prenez n'importe quel critère psychiatrique (anxiété, insomnie ou autres), ce critère sera meilleur dans le groupe qui maintient le traitement c'est à dire ici le groupe B. Faut-il pour autant en déduire qu'il faut maintenir à vie un patient sous opiacé ? Cela pourrait à la limite prêter à sourire mais c'est pour autant exactement ce que l'on fait avec les antidépresseurs.
On pourrait cependant se dire que cette confusion entre symptômes d'un sevrage et symptômes provenant d'une dépression se limite aux études évaluant les rechutes. Et bien pas du tout. La plupart des RCTs antidépresseur vs placebo inclut des patients qui sont déjà sous un IRSS. Cela pose deux problèmes. Le premier qui semble évident est qu'un patient ayant déjà toléré un premier IRSS pourrait probablement mieux toléré un second. Le deuxième est que un patient déjà sous IRSS et qui est assigné au groupe placebo va faire un sevrage. Pour résumer la plupart des RCT antidépresseurs vs placebo sont en fait des RCT {antidépresseurs} vs {placebo+potentiellement sous sevrage} ce qui invalide littéralement une énorme partie des essais cliniques des antidépresseurs. Les méta analyse généralement font mine que ce problème n'existe et compilent donc un ensemble d'études sans valeurs (GIGO).
Mais ce ne sont pas les seuls biais des essais sur les antidépresseurs. Les patients suicidaires sont souvent exclus des études (ce qui est assez absurde). Et il y aussi le biais de publication des essais clinique.
Vous pouvez retrouver ces différentes critiques des antidépresseurs dans un excellent papier d'une réanalyse de la méta analyse de Cipriani et al. : https://bmjopen.bmj.com/content/9/6/e024886 .
Les mêmes biais se retrouvent dans les essais cliniques des antipsychotiques....
En résumé tant que le design des essais est entre le mains des industriels il sera difficile d'avoir une évaluation réelle de ces médicaments. La légitimité d'une branche entière de la médecine se base sur ces essais de mauvaises qualité et également certains intérêts d'industriels ce qui rend généralement assez difficiles toutes critiques de ces médicaments.
Bonjour, merci beaucoup pour ces précisions très intéressantes !
SupprimerVotre article est intéressant mais, à mon avis, ne prend pas suffisament en compte les biais flagrant des essais cliniques concernant les antidéprésseurs (exclusion patients suicidaire, sevrage dans le groupe placébo, placébo run in, les études non positive sont pas publiées). Le commentaire ci-dessus résume bien ces différents biais des essais clinique. Je comprends cependant que parler des antidépresseurs revient à marcher sur des oeufs et qu'il est difficile de les critiquer publiquement. Comme dit dans le commentaire la légitimité entière d'une branche de la médecine se base sur ces essais. Les critiquer c'est s'exposer à des attaques, une ostracisation voir du harcélement de ceux en tirant intérêt.
RépondreSupprimerUn problème souvent rencontré avec ces médicaments, et auquel les médecins ne sont pas formés, est le sevrage de ces médicaments. Ainsi il arrive que des patients formulant le souhait d'arrêter ces médicaments reçoivent comme conseil "d'arrêter ces medicaments car ils n'engendre pas de dépendance" (c'est complétement faux). Ce qui devait arriver arrive, s'est à dire que le patient fait un sevrage (anxiété, insomnie, dysphorie...). Le patient reporte que depuis qu'il a arrêté son psychotrope il ressent de l'anxiété, qu'il n'arrive plus à dormir etc. C'est généralement à ce moment que le petit miracle se produit, le médecin va lui dire qu'il s'agit d'un retour de sa dépression (ce qui est généralement faux) est que c'est la preuve qu'il doit prendre ces médicament à vie. Pour ceux intéressés vous pouvez lire un excellent article : https://markhorowitz.org/wp-content/uploads/2021/04/18TLP1004_Horowitz-1-11.pdf . Cette article propose une méthode de sevrage aux ADs. Cependant des essais cliniques sont nécessaires pour prouver l'efficacité une telle approche. En l'absence de meilleurs donnée, il serait préférable de suivre une telle approche plutôt qu'un arrêt abrupt qui va souvent mener à un syndrome de sevrage brutal.
Si on voulait résumer le problème il y a tout un folklore entourant les médicaments psychiatriques qui ne se base sur aucune donnée et qui se révèle dangeureux pour le patient. Vous entendrez parfois sans sourciller entendre dire, même par des psychiatres, que les antidepresseurs ou antipsychotiques ne peuvent pas causer de dépendance. L'astuce est de jouer avec le mot dépendance. L'on va vous dire que la dépendance doit nécessairement inclure un craving ce que les ADs ou APs n'entrainent pas. Ainsi les antidépresseurs ou antipsychotiques n'entrainent pas de dépendance. En ce qui me concerne, une telle explication relève de la tromperie cependant elle est couramment évoquée. On croirait entendre le même discours qui a mené à la crise des opiacés (les fameux opiacés ne créant pas de dépendance).
Cependant il y a encore un autre tabou concernant ces médicaments. Ils peuvent causer des dommages permanents. La Dyskinésie tardive concernant les antipsychotiques est reconnue, l'akathisie tardive également même si en pratique elle n'est généralement pas diagnostiquée correctement. Il y a récemment d'autres mises en garde de pharmacovigilance (de la PRAC) qui ont été émises concernant des dysfonctions sexuels persistantes après arrêt des ADs : https://www.ema.europa.eu/en/documents/prac-recommendation/prac-recommendations-signals-adopted-13-16-may-2019-prac-meeting_en.pdf . Il est quand même inquiétant de se dire qu'il a fallu presque 40 ans pour qu'un tel signal ait pu être repéré, ce qui témoigne tout de même d'un certain déni entourant les EI des psychotropes. On est quand même passer de médicaments ne causant pas de dépendance à des médicaments pouvant causer des sevrages lourds voir mêmes des dégâts permanents...